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Full text of "Lettres sur les affaires municipales de la cité de Québec [microforme]"

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Photographie 

Sciences 

Coiporation 


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33  WEST  MAIN  STREET 

WEBSTER,  N.Y.  14580 

(716)  872-4503 


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CIHM/ICMH 

Microfiche 

Séries. 


CIHM/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Canadian  Instituts  for  Historicai  Mfcroreproductions  /  Institut  csnadien  de  microreproductions  historiques 


1981 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiti  les 


The  Institute  has  attempted  to  obtain  tha  bast 
original  copy  available  for  filming.  Features  of  this 
copy  which  may  be  bibiiographically  unique, 
which  may  alter  any  of  the  images  in  the 
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tho  usual  method  of  filming,  are  checked  below. 


I    7f   Coloured  covers/ 

I  '^  I    Couverture  de  couleur 


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Covers  damaged,^ 


CoMverture  restaurée  et/ou  pelliculâe 

Cover  title  missing/ 

Le  ti^re  de  couverture  manque 


I I    Couverture  endommagée 

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Coloured  maps/ 

Cartes  géographiques  en  couleur 


Coloured  ink  (i.e.  other  than  blue  or  black)/ 
Encre  de  couleur  (i.e.  autre  que  bleue  ou  noire) 


Coloured  plates  and/or  illustrations/ 
Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 


n 


Bound  uvith  other  matériel/ 
Relié  avec  d'autres  documents 

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along  interior  margin/ 

La  reliure  serrée  peut  causer  de  l'ombre  ou  de  la 
distortion  I'  long  de  la  marge  intérieure 

Blank  leaves  added  during  restoration  may 
appear  vvithin  the  text.  Whenever  possible,  thèse 
hâve  been  omitted  from  filming/ 
Il  se  peut  que  certaines  pages  blanches  ajoutées 
lors  d'un»  restauration  apparaissent  dans  le  ïexte, 
mais,  lorsque  cela  étai^  possible,  ces  pages  n'ont 
pas  été  filmées. 

Additional  com'nents:/  ' 

Commentaires  supplémentaires; 


L'Institut  a  microfilmé  le  meilleur  exemplaire 
qu'il  lui  a  été  possible  de  se  procurer.  Les  détails 
de  cet  exemplaire  qui  sont  peut-être  uniques  du 
point  de  vue  bibliographique,  qui  peuvent  modifier 
une  image  reproduite,  ou  qui  peuvent  exiger  une 
modification  dans  la  méthode  normale  de  filmage 
sont  indiqués  ci-dessous. 


□    Coloured  pages/ 
Pages  de  couleur 

FTY  Pages  damaged/ 

I I    Pages  endommagées 

I      I    Pages  restored  and/or  laminaiCed/ 


Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 

Pages  discoloured,  stained  or  foxed/ 
Pages  décolorées,  tachetées  ou  piquées 


El    Pages  detached/ 
J    Pages  détachées 

p"/^  Showthrough/ 
I — I    Transparence 

I      j    Ouality  of  print  varies/  > 


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Qualité  inégale  de  l'impression 

Includes  supplementary  matériel/ 
Comprend  du  matériel  supplémentaire 


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Only  édition  available/ 
Seule  édition  disponible 

Pages  wholly  or  partially  obscured  by  errata 
slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
ensure  the  best  possible  image/ 
Les  pages  totalement  ou  partiellement 
obscurcies  par  un  feuillet  d'errata,  une  pelure, 
etc.,  ont  été  filmées  à  nouveau  de  façon  à 
obtenir  la  meilleure  image  possible. 


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10X 

14X 

18X 

22X 

26X 

30X 

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12X 


16X 


20X 


24X 


28X 


32X 


The  copy  filmed  hère  has  bsen  reproduced  thanks 
to  the  generosity  of  : 

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Archives  of  Canada 


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publiques  du  Canada 


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the  lest  page  with  a  printed  or  illustrated  mpres- 
sion,  or  the  back  cover  when  appropriate.  AH 
other  original  copies  are  filmed  beginning  on  the 
first  page  with  a  printed  or  illustrated  impres- 
sion, and  ending  on  the  last  oage  with  a  printed 
or  illustrated  impression. 


Les  images  suivantes  ont  été  reproduites  avec  le 
plus  grand  soin,  compte  tenu  de  la  condition  et 
de  I»  netteté  de  l'exemplaire  filmé,  et  en 
conformité  avec  les  conditions  du  contrat  de 
filmage. 

Les  exemplaires  originaux  dont  la  couverture  en 
papier  est  imprimée  sont  lilmés  en  commençant 
par  le  premier  plat  et  en  terminant  soit  par  la 
dernière  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration,  soit  par  le  second 
plat,  selon  le  cas.  Tous  les  autres  exemplaires 
originaux  sont  filmés  en  commençant  par  la 
première  page  qui  comporte  une  empreinte 
d'impression  ou  d'illustration  et  en  teri  linant  par 
la  dernière  page  qui  comporte  une  telle 
empreinte. 


The  last  recorded  frame  on  each  microfiche 
shall  contain  the  symbol  ~^  (meaning  "CON- 
TINUEO  "),  or  the  symbol  V  (meaning  "END  "), 
whichever  applies. 


Un  des  symboles  suivants  apparaîtra  sur  la 
dernière  image  de  chaque  microfiche,  selon  le 
cas:  le  symbole  — ►  signifie  "A  SUIVRE  ".  le 
symbole  V  signifie  "FIN". 


Maps,  plates,  charts,  etc.,  may  be  filmed  at 
différent  réduction  ratios.  Those  too  large  to  be 
entirely  included  in  one  exposure  are  filmed 
beginning  in  the  upper  left  hund  corner,  left  to 
right  and  top  to  bottom,  as  many  f rames  as 
required.  The  following  diagrams  illustrate  the 
method: 


Les  cartes,  planches,  tableaux,  etc.,  peuvent  être 
filmés  à  des  taux  de  réduction  différents. 
Lorsque  le  document  est  trop  grand  pour  être 
reproduit  en  un  seul  cliché,  il  est  'limé  à  partir 
de  l'angle  supérieur  gauche,  de  gauche  à  droite, 
et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


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LETTRES 


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AFFAIRES  MUNICIPALES 


DC  LA 


CITÉ    DE    QUEBEC 


PAR 


F.  liAIVOGILlËR 


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QUEBEC 

IMPRIMERIE    DE   LÉVÊNEMENT 

1868 


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LETTllES 


SUR    LKS 


AFFAIRES    MUNICIPALES 


DK   LA 


CITE    DE    QUEBEC 


I. 


Il  est  devenu  presque  de  mode,-  d'accuser  la 
Corporation  de  tout  ce  dont  nous  avons  à  nous 
plaindre.  A  en  croire  certains  journaux  et  leurs 
correspondants,  si  l'on  ne  voit  pas  s'élever  de 
constructions  nouvelles,  s'il  y  a  des  maisons  qui  ne 
trouvent  pas  de  locataires,  si  la  valeur  de  la  pro- 
priété foncière  a  diminué,  si  les  affaires  sont  stagnan- 
tes, si  l'industrie  de  la  construction  des  navires  se 
meuH,  si  le  commerce  s'en  va,  c'est  à  notre  régime 
mtinicipal  qu'il  faut  s'en  prendre.  Qu'un  homme 
se  fasse  éclabousser,  qu'une  dame  déchirela  traîne 
de  sa  robe,  qu'un  individu  se  donne  une  entorse  au 
pied,  <^u'un  maladroit  se  fasse  souffler  son  porte- 
monnaie,  qu'un  tier-à-bras  noircisse  l'œil  à  un  char- 
retier, qu'un  voyou  donne  à  un  autre  un  coup  de 
pied  où  vous  savez,  je  connais  une  feuille  qui  ne 
manque  jamais  de  s'écrier:  jusqu'à  quand,  citoyens 
de  Québec,  endurerez-vous  cette  horreur  de  Cor- 
poration ? 


—  4  —  , 

A  entendre  les  mêmes  journaux,  il  sufHrait  de 
remplacer  notre  conseil  municipal  par  deux  ou 
trois  commissaires  de  leur  choix  et  bien  payés,  p  >ur 
voir,  sans  que  nous  soyons  taxés,  notre  police  ren- 
dre des  points  à  celle  de  Paris,  nos  chantiers  remplis 
de  navires  en  construction,  une  activité  fiévreuse 
régner  dans  les  affaires,  notre  commerce  faire  pâlir 
celui  de  Londres,  et  nos  rues,  éblouissantes  de  pro- 
preté, se  garnir  de  palais  qu'habiteraient  des  nabads 
dix  fois  millionnaires. 

Tant  que  ce  langage  n'a  été  tenu  que  par  des 
gens  intéressés  à  faire  croire  à  la  mauvaise  admi- 
nistration de  nos  affaires  municipales,  par  des 
hommes  qui  nous  voudraient  sauver  avec  un  désin- 
téressement que  leur  passé  a  déjà  mis  au  jour,  par 
des  individus  qui  ont  un  commissaire  à  nous  offrir, 
il  n'y  avait  pas  lieu  de  s'alarmer  outre  mesure. 
Tout  le  monde  savait  à  qu«i  s'en  tenir,  et  notre 
crédit  n'en  pouvait  être  ébranlé.  Mais,  à  force 
d'entendre  répéter  que  nous  sommes  volés,  que 
nous  sommes  ruinés,  que  nous  nous  en  allons  à  la 
banqueroute,  que  sans  des  commissaires  pour  admi- 
nistrer nos  affaires  municipales,  c'en  est  fait  de  nous, 
comme  on  chante  machinalement  un  refrain  qu'on 
a  entendu  souvent,  nous  avons  fini  par  le  dire  à 
notre  tour.  Et  nous  voilà,  à  force  de  nous  dire 
malades,  en  train  de  prendre  la  maladie. 

En  effet,  rien  n'est  plus  propre  qu'une  pareille 
conduite,  à  ruiner  notre  crédit,  à  nous  abaisser  et  à 
nous  perdre  dans  l'estime  des  étrangers.  Que  pen- 
seriez-vous  d'un  individu  qui  viendrait  vous  dire  : 
"je  suis  incapable  d'administrer  mes  propres  affai- 
res ;  si  vous  ne  vous  eu  chargez  pas,  je  suis  entière- 
ment ruiné  ;  je  suis  si  maladroit  dans  le  choix  de 
mes  employés,  je  les  surveille  si  mal,  qu'ils  me 
volent  et  me  pillent  impunément  ? ,"  Je  n'ai  pas 
besoin  d'attendre  votre  réponse.  Vous  ne  manque- 
riez pas  de  dire  :  voilà  un  homme  qui  me  parait 
'  avoir  un  excellent  cœur,  mais  il  a  la  tête  mal  meu- 
blée. 

Telle  est,  pourtant,  la  conduite  que  nous  tenons 
en  face  de  tout  le  pays  depuis  quelques  années. 
Nous  sommes  continuellement  à  dire  que  notre 


5 


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conseil  municipal  est  wno  réunion  d'escrocs  et  d'im- 
bôcileSjdont  nous  demandons  qu'on  nous  débarrasse; 
comme  si  ces  escrocs  et  ces  imbécih.'s  n'  ^^aient  pas 
nosrepré8entants,comme  s'ils  ne  devaient  pas  passer 
aux  yeux  des  étrangers,  pour  la  quintescence  de 
notre  intelligence  et  do  notre  honnêteté,  comme 
s'ils  n'étaient  pas  choisis  par  nous,  comme  îj'il  no 
dépendait  pas  de  noi!8  et  uniquement  de  nous,  de 
les  nommer  plus  intègres  et  plus  intelligents.  Nos 
lamentations  continuelles  ne  sont-elles  pas  un  con- 
tinuel aveu  de  notre  impuissance  à  nous  gouverner 
nous-mêmes  ?  N'est-il  pas  temps  qu'elles  cessent, 
que  nous  examinions  notre  situation,  que  nous 
nous  demandions  si  elle  est  aussi  mauvaise  que 
nous  l'avons  cru  et  que  nous  lavons  dit,  que  nous 
en  recherchions  la  cause,  que  nous  voyions  si  nous 
sommes  moins  capables  de  gérer  iios  affaires  que 
les  citoyens,  je  ne  dis  pas  de  Montréal^  mais  du 
dernier  village  de  l'Amérique  du  Nord,  et  si  notre 
intelligence  est  tellement  faille,  qu'il  faible  nous 
interdire  et  nous  mettre  en  curatelle  ? 

Après  avoir,  comme  bien  d'autres,  déploré  le 
mauvais  état  de  nos  affaires  municipales  sans  en 
rien  connaître,  après  l'avoir  attribué,  comme  tout  le 
monde,  à  la  maladresse  et  à  la  négligence  de  ceux 
qui  les  administrent,  après  avoir  même  appelé  de 
mes  vœux,  le  remplacement  du  conseil  électif  que 
nous  avons,  par  des  commissaires  nommés  par  le 
gouvernement,  je  me  suis  enfin  posé  les  questions 
qui  précèdent  :  j'ai  étudié  not'*  système  municipal, 
j  en  ai  examiné  le  fonctionnement,  je  me  suis 
demandé  si  nous  avions  beaucoup  à  gagner,  à  voir 
substituer  à  une  administration  qui  nous  doit  ren- 
dre compte  de  tous  ses  actes,  une  administration 
sur  laquelle  nous  n'aurions  aucun  contrôle.  Et 
j'en  us  venu  à  la  conclusion  que  notre  situation, 
sans  être  brillante,  n'est  pis  désespérée,  que 
notre  administration  municipale  n'est  pas  plus 
mauvaise  que  celle  de  Montréal,  et  que  mettre  des 
commissaires  à  la  place  de  notre  conseil,  ce  serait. 
non  pas  faire  cesser  les  maux  dont  nous  nous  plai- 
gnons, mais  nous  fermer  les  yeux  sur  eux  ;  ce  serait 
faire  comme  l'autriiche  qui,  croyant  que  le  chasseur 


—  6  — 

la  perdra  de  vue  si  elie  cesse  elle-même  de  le  voir, 
s'enfonce  la  tête  dans  le  sable. 

Il  est  facile,  en  effet,  de  se  convaincre,  que 
nôtre  situation  financière  est  encore  solide,  (jue 
notre  conseil  municipal  est  au  moins  aussi  bien 
composé  que  celui  de  Moiitréal,  et  que  ceux  de  ses 
membres  qui  sont  d«s  hommes  distingués  ailleurs^ 
ne  perdent  pas  la  tête  en  y  entrant,  qu'ils  adminis- 
trent aussi  bien  sous  le  nom  de  conseillers  ou  d'éche- 
7ins,  qu'ils  le  pourraient  faire  sous  celui  de  com- 
missaires. 

II. 


D'abord,  notre  situation  financière  est-elle  aussi 
mauvaise  qu'on  le  prétend  ?  Il  suffit,  pour  se  con- 
vaincre du  contraire,  de  jeter  les  yeux  sur  les  cotes 
de  la  bourse.  Elles  nous  font  connaître  le  crédit  des 
différents  corps  publics,  et  l'on  sait  que  le  crédit 
est  un  indicateur  presqu'infaillible  de  la  situation 
financière  dos  villes  et  des  individus.  Or,  malgré 
tout  le  mal  que,  depuis  cinq  ans,  on  n'a  cessé  de 
dire  de  notre  administration  municipale,  malgré 
les  cris  de  gaspillage,  de  vol,  de  ruine,  de  banque- 
route, partis  d'individus  qu'on  pouvait  supposer 
bien  informés,  et  qui  se  sont  fait  entendre  jusque 
dans  le  parlement,  qu'y  voyons-nous  ?  Nos  bons 
sont  encore  cotés  de  93  à  08,  pendant  que  ceux  de 
Montréal  sont  cotés  à  104,  ceux  de  Toronto  à  93, 
ceux  d'Ottawa  à  91. 

Nous  pouvons  donc  être  assurés  de  ce  côté 
pour  le  moment.  Mais,  sommes-nous  en  danger 
pour  l'avenir,  à  cause  de  la  manière  dont  sont  ad- 
ministrées nos  affaires  ?  Je  n'hésite  pas  à  dire  que 
non. 

Examinons  la  composition  du  Conseil-de- Ville. 
A  sa  tête  nous  voyons  le  chef  d'une  de  nos  principales 
maisons  de  commerce  en  gros.  On  pourrait  trou- 
ver, saiiS  doute,  un  homme  ayant  plus  de  connais* 
sauces  littéraires  que  M.  Lemesurier.  Mais  un 
maire  n'a  pas  pour  mission  de  faire  des  modèles 
pour  les  élèves  de  rhétorique.  C'est  un  adminis- 
trateur ;  tout  ce  qu'on  peut  exiger  de  lui,  c'est  la 


—  7  — 


science,  le  génie  et  la  langue  des  affaires  ;  et  per- 
sonne à  Québec,  n'osera  contester  ces  qualités  à  M. 
LeMesurier,  pas  plus  qu'on  ne  lui  contestera  l'é- 
nergie, le  travail  et  l'esprit  d'entreprise. 

On  a  dit  bien  des  fois,  que  le  conseil  n'offrait 
aucune  garantie  à  la  propriété  foncière,parce  i^u'on 
îa'y  trouvait  personne  intéressé  à  cette  partie  de  la 
fortune  publique,  Or  si  nous  jetons  les  yeux  sur  la 
liste  des  échevins  et  conseillers,  nous  y  voyons  les 
noms  d'un  J.  R.  Kenaud,  d'un  W.  \V.  Scott,  d'un  A. 
Hamel,  trois  des  plus  grands  propriétaires  fonciers 
de  Québec,  trois  nommes  qui,  par  leur  travail,  leur 
industrie,  leurs  talents  pour  leurs  affaires,  ont  acquis 
des  fortunes  comme  on  en  rencontre  peu  en  ce 
pays. 

un  a  laissé  entendre  que  la  majeure  partia  du 
conseil  se  compose  de  va-nu-pieds,  de  créatures  de 
la  populace,  d'orateurs  de  carrefours.  Eh  bien  !  à 
côté  des  trois  grands  propriétaires  que  je  viens  de 
nommer  siègent,  le  l)r.  Rinfret,  un  autre  grand 
propriétaire,  l'un  des  médecins  les  pins  achalandés 
de  la  vilb  ;  le  Dr.  H.  Blanchet  et  M.  Henry,  deux 
de  nos  plus  grands  capitalistes  ;  MM.  Côté  et  Mail- 
loux,  deux  des  principaux  marchands  de  St.-Roch  ; 
>IM.  John  Hearn,  Hossack,  St.-Michel,  Hall,  Griblin, 
cinq  de  nos  premiers  hommes  d'affaires,  dont  l'un 
est  fondateur  du  Chronicle  et  procureur  de  la 
Fabrique  de  St.-Roch,  et  un  autre  membre  de 
r  Assemblée  Législative  de  la  Province  de  Québec  ; 
M.  Peachy,  l'architecte  le  plus  employé  de  la  ville; 
MM.  M.  A.  Hearn  et  L'égaré,  le  premier  bâtonnier 
actuel,  le  second  ancien  bâtonnier  du  barreau  de 
Québec;  enfin,  M.  Auger,  l'un  des  notaires  les  plus 
intelligents  et  les  plus  instruits  de  Québec,  et  M. 
Lafrance,  secrétaire  de  la  Société  St.  Jean-Baptiste. 

On  a  prétendu  que  l'élection  ne  peut  faire  arri- 
ver au  conseil,  des  hommes  aussi  distingués  que 
ceux  que  pourrait  nommer  le  gouvernement.  Et, 
comme  pour  donner  le  démenti  à  cette  prétention,  le 
système  éhctif  a  mis  à  la  tête  du  comité  de  la  santé 
publique,  le  Dr.  Roy,  c'est-à-dire  précisément 
l'homme  que  le  gouvernement  a  dû  juger  le  plus 
capable  d  empêcher  l'introduction  parmi  nous  des 


—  8 


il' 


maladies  épidémiques  et  contagieuses,  puisqu'il  l'a 
nommé  à  l'emploi  important  de  médecin-visiteur  du 
port  de  Québec.  Si  donc  les  partisans  des  commis- 
saires voulaient  prétendre  que  le  suffrage  populaire 
s'est  égaré  ici,  il  leur  faudrait  admettre  que  le  gou- 
vernement est,  lui  aussi,  sujet  à  l'erreur. 

Voilà  les  hommes  que  nous  trouvons,  dans  u» 
conseil  composé  en  tout  de  25  personnes.  Je  crois 
donc  qu'on  pourrait  le  confronter  sans  crainte,  non 
seulement  avec  n'importe  quel  autre  conseil  muni- 
cipal— cela  nous  ferait  la  partie  trop  belle—  mais 
avec  les  commissions  nommées  par  Je  gouverne- 
ment, comme  celle  du  Havre  et  des  chemins  à 
barrières.  J'irai  même  plus  loin,  et  je  dirai  que 
j'embarrasserais  beaucoup  un  adversaire  des  corps 
éleciifs,  un  partispn  des  nominations  pat  le  gouver- 
nement, si  je  lui  offrais  de  comparer  notre  conseil 
municipal,  dont  on  dit  tant  de  mai,  avec  le  Conseil 
Législatif,  dont  il  doit  penser  tant  de  bien,  si  je  lui 
demandais  de  me  trouver,  sur  25  conseillers,  20 
hommes  de  la  valeur  intellectuelle  de  ceux  que  j'ai 
nommés. 

Je  désire  être  bien  compris.  Je  n'entends  pas 
me  fairo  l'apologiste  de  tous  les  membres  du  con- 
seil, ni  les  mettre  loue  au  même  rang.  Je  suis  le 
premier  à  admettre  qu'il  y  en  a  dont  Tintelligence 
et  la  connaissance  des  affaires  laissent  à  désirer, 
dont  l'intégrité  et  le  désintéressement  sont  loin 
de  pouvoir  être  cités  comme  modèles.  Mais  ce 
que  je  soutiens,  c'est  que,  pris  dans  son  ensem- 
ble, notre  Conseil  de-V  il  le  renferme  relativement 
autant  d'hommes  intelligents,  instruits  et  honnêtes, 
non  seulement  que  celiu  de  Montréal,  mais  que 
n'importe  quelle  organisation  administrative  du 
pays,  et  que  nous  n'aurions  rien  à  gagner  sur  ce 
ponit  à  la  nomination  de  commissaires. 


9  — 


III. 

Mais  on  me  dira  :  peu  importe  qr^  vos  conseil-' 
1ers  municipaux  aient  de  l'honnêteté,  de  l'intelli- 
gence, et  soient  des  hommes  d'affaires,  s'ils  n'en  font 
pas  preuve  dans  leur  administration. — A  cela  je  ré- 
pondrai, que  l'on  a  bien  souvent  dit,  mais  que  jamais 
on  n'a  prouvé  que  nos  affaires  fussent  mat  adminis- 
trées. Et  j'espère  établir,  que  l'on  a  tiré  de  nos  res- 
sources, un  aussi  bon  parti  que  celui  que  l'on  pou- 
vait attendre  d'une  administration  aocive  et  intelli- 
gente. 

Que  peut-on  exiger  d'une  bonne  administration 
municipale  ?  N'est-ce  pas  qu'elle  veille  à  la  conser- 
vation de  la  santé  publique,  à  la  protection  de  la 
propriété  et  de  la  vie  des  citoyens  ?  N'est-ce  paj 
■qu'elle  facilite  le  commerce  et  les  approvisionne- 
ments ?  N'est-ce  pas  qu'elle  fasse  tout  '^ela  en  impo- 
sant des  charges  aussi  léffères  que  possible  sur  les 
citojrens  ?  EH  bien  !  cet  idéal  d'une  bonne  adminis- 
tration municipale,  nous  ne  l'avons  pas,  sans  doute, 
mais  je  n'hésite  pas  à  dire  que  nous  n'en  sommes 
pas  aussi  éloignés  qu'on  se  l'imagine,  que  ce  qui 
nous  manque  pour  y  arriver,  nous  ne  1  aurons  pas 
en  décriant  le  conseil,  et  nous  l'obtiendrons  moins 
encore,  en  remplaçant  le  système  actuel  par  des 
commissaires. 

Commençons  par  la  santé  publique.  Peut-on 
reprocher  à  notre  administration  municipale,  de 
n'avoir  pas  pris  les  mesures  nécessaires  pour  éviter 
les  épidémies  ?  Tous  les  ans  le  conseil  nomme, 
dans  chaque  quartier,  un  médecin  chargé  de  vacci- 
ner toutes  les  personnes  qui  ne  sont  pas  an  état  de 
payer  pour  ce  service.  Chaque  fois,  depuis  plusieurs 
années,  que  la  santé  publique  a  été  menacée,  on  a 
nommé  des  officiers  de  santé,  chargés  de  faire 
observer  les  lois  de  Thygiène  et  de  la  pi-opreté,  de 
fournir  aux  pauvres  des  désinfectants.  Et,  si  l'on  a 
pu  reprocher  quelque  chose  à  ces  fonctionnaires, 
c'est  plutôt  un  excès  de  zèle  que  de  la  négligence. 

Une  des  choses  les  plus  importantes  pour  la 
santé    d'une    ville,    c'est    un    approvisionnement 


—  10  — 

I 

abondant  d'eau  saine  et  aj^réable  au  goût.  Eh  bien  T 
ce  conseil  municipal,  quon  dit  incapable  de  rien 
faire  de  b'en  a,  dans  ce  but,  fait  construire  un 
aqueduc  qui  est  un  des  meilleurs  ouvrages  en  c& 
genre  de  toute  l'Amérique.  Pendant  que  les  habi- 
tants de  Montréal,  de  cette  ville  dont  on  se  conten+e 
de  comparer  l'administration  à  la  nôtre,  pour  prou- 
ver l'imperfection  de  celle-ci,  pendant  que  les 
citoyens  de  Montréal,  après  avoir  dépensé  des  som- 
mes énormes  pour  leur  aqueduc,  sont  continuelle- 
ment menacés  de  manquer  d'eau,  nous  en  avons 
assez  pour  une  ville  de  100,000  Ames. 

Je  demande  au  partisan  le  plus  enragé  des- 
commissaires ce  qu'ils  auraient  fait  de  mieux. 

L'administration  doit  protéger  la  propriété  et 
la  vie  des  citoyens,  par  une  police  bien  dirif^ée,  par 
une  bonne  organisation  contre  les  incendies.  Les 
•  adversaires  du  régime  municipal  doivent  être 
dans  un  grand  embarras,  lorsqvVils  examinent  cette 
partie  de  notre  administration.  Jusqu'à  ces  der- 
nières années,  les  membres  du  corps  de  police 
éîaient  nommés  par  le  conseil.  Il  fut  fait  de  mau- 
vaises nominations — les  abus  sont  inséparables  de 
toute  administration  publique.  Mais  notre  système 
municipal  avait  déjà  des  ennemis  et  celai  des  com- 
«aires  des  partisans.  Alors,  comme  aujourd'hui,  le 
conseil  municipal  était,  pour  eux,  la  cause  de  tous 
nos  maux,  et  il  suffisait  de  le  remplacer  par  des 
commissaires,  pour  ramener  l'âge  d'or  parmi  nous. 

•  Mettez  la  police  sous  la  direction  de  commissaires, 

•  disaient-ils,  et  vous  verrez  comme  elle  deviendra 
efficace.  , 

On  les  prit  au  mot  :  une  loi  vint  enlever  au  con- 
seil le  contrôle  de  la  police,  et  le  remettre  à  des 
commissaires.  Pcar  s'assurer  que  la  commission  ne 
serait  pas  composée  des  premiers  venus,  il  fut 
décidé  qu'elle  aurait  pour  membres  le  magistrat  de 
police,  le  recorder  et  le  maire.  Quest-il  résulté  de 
cette  organisation  nouvelle?  Des  prodiges V  Oui; 
mais  pas  ceux  qu'attendaient  ses  promoteurs  ;  des 


-11  — 

prodiges  de  mauvaise  administration,  s'il  faut  en 
croire  la  voix  publique.  Jamais  la  police  nommée 
par  le  conseil  n'avait  soulevé  autant  de  plaintes, 
qu'en  soulève  celle  que  nomment  et  dirigent  au- 
jourd'hui des  commissaires.  La  seule  supériorité 
de  la  police  actuelle,  c'est  qu'elle  coûte  beaucoup 
plus  cher  que  l'ancienne,  et  que  nous  ne  la  pou- 
vons pas  changer. 

On  voudra  bien  remarquer  que  je  ne  me  fais 
pas  l'écho  de  ces  plaintes.  Sans  doute  notre  police 
est  loin  de  la  perfection  ;  mais  je  n'hésite  pas  à  dire 
qu'elle  est  aussi  efficace  que  le  permettent  le  petit 
nombre  d'hommes  qui  la  composent  et  l'étendue  de 
Ja  ville.  Moins  nombreuse  de  moitié  que  celle  de 
Montréal,  elle  a  presqu'autant  de  service  à  faire. 
Les  commissaires  ont  fait  tout  ce  qu'on  pouvait 
attendre  d'eux.  Mais  je  cite  ce  lait,  pour  prouver 
qu'une  commission  n'est  pas  plus  infaillil  ^  ^  qu'un 
conseil  électif,  et  l'une  pas  plus  que  l'autre  ne  peut 
réussir  à  contenler  tout  le  monde. 

Nous  venons  de  voir  la  police  que  dirigent  des 
commissaires.  Examinons,  maintenant,  l'organisa- 
tion contre  les  incendies,  établie  et  maintenue  par 
le  conseil.  Tout  le  monde  s'accorde  à  reconnaître 
son  efficacité.  Elle  a  fait  diminuer  de  80  pour  100 
les  pertes  résultant  d'incendies.  Notre  télégraphe 
d'alarme  est  supérieur  môme  à  celui  de  New-York. 
Notre  brigade  du  fev,  composée  de  25  hommes,  fait, 
à  la  satisfaction  universelle,  un  service  qui  en  de- 
manderait 50.  En  une  seule  année,  notre  organisa-^ 
tion  a  donné  plus  que  ce  qu'a  coûté  son  établisse- 
ment, et  ce  que  coûtera  son  entretien  pendant  10 
ans.  On  est  encore  à  entendre  contre  elle  une 
plainte  fondée. 

V. 


Une  bonne  ''administration  doit  faciliter  le 
commerce  et  les  approvisionnements,  en  établis- 
sant des  marchés  où  le  producteur  puisse  venir 
rencontrer  le  consommateur,  en  ouvrant  et  mainte- 
nant de  bonnes  voies  de  communication.  Tout  le 
monde  admettra  que  nos  marchés  laissent  peu  de 


12  — 


chose  à  désirer,  sinon  du  côté  de  l'élégance,  au 
moins  du  côté  du  nombre,  du  site  et  de  l'aménage- 
ment intérieur.  Et  je  ne  sache  pas  qu'on  ait  fait  de 
reproches  au  conseil,  à  l'égard  des  clercs  qui  en 
ont. la  surveillance. 

Quant  aux  voies  de  communication,  j'admettrai 
facilement  qu'elles  auraient  besoin  d'être  amélio- 
rées. Plusieurs  de  nos  rues  ne  sont  pas  éclairées 
du  tout,  ou  le  sont  d'une  manière  imparfaite.  Le 
plus  grand  nombre  sont  dans  un  bien  mauvais  état 
d'entretien.  Pour  nier  cela,  il  faudrait  fermer  les 
yeux  à  l'évidence.  Mais  la  question  n'est  pas  de 
.savoir  si  nos  rues  sont  en  bon  ou  en  mauvais  état  ; 
il  s'agit  de  savoir  si  des  commissaires  pourraient, 
avec  les  ressources  dont  dispose  le  conseil,  les  tenir 
en  meilleur  ordre.  y 

Or,  il  est  facile  de  prouver  que,  à  commencer  * 
par  l'éclairage,*  des  commissaires  ne  feraient  pas 
mieux  que  le  conseil.  Tout  le  monde  admettra, 
qu'on  ne  peut  de  nos  jours  considérer  une  ville  bien 
éclairée,  que  si  elle  est  éclairée  au  gaz  ;  l'huile  de 
pétrole  nous  ramènerait  au  temps  des  quinquets  et 
des  lanternes.  Nous  ne  pouvons  obtenir  du  gaz 
que  d'une  compagnie,  et  elle  profite  de  son  mono- 
pole, pour  faire  payer  des  prix  absurdes,  afin  de 
donner  à  ses  actionnaires  des  dividendes  scanda- 
leux. Tout  le  monde  se  plaint  de  cet  abus,  mais,  en 
attendant,  tout  le  monde  en  souffre,  la  municipalité 
comme  les  individus.  Jusqu'à  ce  jour,  le  conseil  a 
payé  les  prix  ruineux  que  paient  les  particuliers. 
Mais  à  la  fin,  il  s'est  fatigué  de  se  faire  exploiter. 
8on  contrat  avec  la  compagnie  devait  expirer  le  pre- 
mier novembre.  Dès  le  commencement  d'octobre, 
à  la  suggestion  du  maire,  il  donne  avis  qu'il  ne  le 
renouvellera  pas,  et  charge  son  premier  magistrat 


d'offrir  $20  par  bec  de  gaz  pour  l'année.  Au  pre- 
mier novembre,  la  compagnie,  qui  n'avait  ipas 
encore  pris  de  décision  à  ce  sujet,  cesse  de  fournir 
dji  gaz,  laissant  la  villi  dans  l'obscurité.  Pour  jeter 
sur  le  conseil  lodienx  de  sa  conduite,  elle  avait 
offert  de  continuer  l'éclairage  pendant  un  mois, 
aux  conditions  de  l'année  dernière.  C'était  profiter 
de  la  position  du  conseil,  pour  exploiter  le  public 


—  13  — 

encore  un  mois,  et  précisémenf  'lans  le  moment  où, 
d'après  l'ancien  contrat,  cette  exploitation  est  le 
plus  profitable. 

Qu'est-il  arrivé  ?  La  compagnie,  peur  amener  le 
conseil  à  nous  laisser  voler  par  elle,  avait  eu  l'au- 
dace de  laisser  la  ville  dans  l'obscurité  au  moment 
où  l'éclairage  était  le  plus  nécessaire  ;  on  n'a  pas 
eu  un  mot  de  blAmc  pour  elle.  Le  conseil  avait 
voulu  défendre  notre  bourse  ;  on  n'a  pas  eu 
de  termes  assez  sévères  pour  censurer  sa  con- 
duite ;  on  lui  a  reproché  amèrement  les  efforts 
qu'il  avait  faits  pour  que  nous  ne  fussions  plus 
volés.  Si  l'opinion  publique  l'avait  soutenu,  il  r 
aurait  pu  réussir  à  amener  la  compagnie  à  la  raison,  ^ 
la  forcer  à  accepter  des  conditions  moins  onéreuses 
pour  nos  finances.  Mais,  pressé  d'un  côté  par  les 
exigences  de  la  compagnie,  en  but  te  de  l'autre,  aux 
injustes  attaques  de  ceux  qu'il  voulait  défendre,  il  ' 
a  dû  céder  et  en  passer  parce  qu'on  voulait.  Qu'en 
va-t-il  résulter  ?  C'est  que  nor.o  «vurons  encore  à 
payer  pour  l'éclairage  de  nos  lues  n  prix  exorbi- 
tant. Mais,  je  le  demande,  est-ce  que  les  commis- 
saires auraient  fait  mieux  dans  les  mêmes  circons- 
tances ? 


VL 


Quant  à  l'entretien  des  rues,  il  est  imi^ortant 
pour  apprécier  la  condition  du  conseil  à  cet  égard, 
de  ne  pas  oublier  la  modicité  des  ressources  dont 
il  peut  disposer  pour  cette  partie  de  l'adi)  inistra- 
tion,  et  les  difficultés  exceptionnelles  qu'elle  pré- 
sente. La  partie  basse  de  la  ville  est  construite  sur 
un  terrain  d'alluvion,  que  la  moindre  pluie  conver- 
tit en  un  lac  de  vase.  Ou  ne  peut  maintenir  solide 
la  chaussée  des  rues,  qu'à  force  de  travaux  ;  on  ne 
perd  les  é^outter  qu'avec  beaucoup  de  dépenses. 
La  partie  naute  est  remplie  de  côtes,  qui  consti- 
tuent autant  de  torrents  les  jours  d'orage.  L'eau, 
dans  sa  descente  rapide,  emporte  tout  devant  elle, 
et  sillonne  nos  rues  de  ra^  ins  qu'il  faut  combler 
lorsque  le  beau  temps  est  revenu. 


I 


—  14  — 


'   !!ll 


Mal^é  tous  ces  obstacles,  nos  voies  de  com- 
munication no  sont  pas  dans  un  aussi  mauvais 
état  qu'on  le  dit.  Les  grandes  artères  qui  mettent 
en  communication  les  différentes  parties  de  la  ville, 
les  rues  les  plus  importantes,  sont  macadamisées. 
Depuis  quelques  années,  on  a  planchéié  les  rue.s 
Fleury  et  8t.  François,  et  macadamisé  les  rues  St. 
Pierre,  St.  Paul,  St.  Joseph,  de  la  Couronne,  St. 
Jean,  de  la  Fabrique,  Buade,  Port-Dauphin  et  la 
côte  de  la  Montagne  ;  on  a  élargi  les  rues  St.  Ours 
et  Champlain.  On  aurait  pavé  les  rues  St.  Pierre  et 
St.  Paul,  si  nos  finances  l'eussent  permis. 

Sans  doute,  on  pourrait  désirer  que  nos  rues 
fussent  balayées  et  arrosées  plus  souvent  ;  mais 
on  admettra,  que  cela  est  moins  nécessaire  que  d'y 
rendre  la  circulation  facile.  Avant  le  superflu  le 
nécessaire. 

D'ailleurs,  on  nous  cite  toujours  Montréal; 
mais,  outre  que  cette  ville  dispose  de  ressources 
que  tous  les  commissaires  du  monde  ne  pourraient 
nous  procurer,  il  ne  faut  pas  que  l'on  s'imagine  que 
toutes  les  rues  y  sont  comme  la  rue  Notre-Dame  et 
la  grande  rue  St.  Jacques,  les  seules  que  la  plupart 
d'entre  nous  connaissent.  Qu'on  aille  dans  le 
Griffintown,  dans  le  quartier  Ste.  Marie,  dans  ie 
quartier  St.  Laurent,  et  l'on  y  trouvera  facilement 
des  rues,  où  la  "vue  et  l'odorat  ne  sont  pas  plus 
flattés  que  dans  les  plus  mal  tenues  des  nôtres. 
Qu'on  ouvre  les  journaux  de  Montréal,  et  l'on  y 
verra,  qu'un  jour  un  juge,  et  le  lendemain  une 
dame,  se  cassent  la  jambe  dans  un  trottoir  délabré. 
Et,  à  ceux  qui  voudraient  reprocher  au  conseil  de 
ne  point  nous  donner  au  moins  quelques  rues  aussi 
belles  que  les  plus  belles  de  Montréal,  je  dirai  : 
quand  vous  aurez  fait  des  constructions  aussi  élé- 
gantes et  aussi  somptueuses  que  celles  que  l'on 
trouve  sur  les  rues  Notre-Dame,  McGill,  St.  Paul 
et  St.  Jacques,  vous  aurez  droit  d'exiger  que  l'ad- 
ministration municipale  vous  donne  des  trottoirs 
en  asphalte,  et  des  rues  recouvertes  de  NicholsovUs 
pavement.  Mais,  tant  que  vous  vous  contenterez, 
comme  aujourd'hui,  d'élever  des  amas  de  caillons  à 
peine  dégrossis,  de  brique  rouge  mal  cuite,  ou  bien 


—  15  — 


s 
s 


de  rafistoler  des  masures  contemporaines  de  Cham- 
plain,  de  débarbouiller  des  cabaAons  en  bois,  non- 
seulement  vous  n'aurez  pas  le  droit  de  vous  plain- 
dre, si  l'on  ne  vous  donne  que  des  ruef»  ma'^adami- 
sées  avec  des  matériaux  de  démolition,  mai»  vous 
devrez  vous  considérer  comme  trop  bien  traités, 
si  l'on  vous  donne  des  voies  de  communication 
préférables  à  celles  de  la  bourgade  de  tStadaconé. 


t.%  I  '  •>; 


VII. 


Ainsi,  sur  les  principales  branches  de  l'admi- 
nistration, j'ai  prouvé  que  le  conseil  taisait  aussi 
bien  que  feraient  des  commissaires,  peut-être 
mieux.  Prenons,  maintenant,  une  vue  d'ensemble 
.  j  cette  administration.  Voyons  si  le  conseil  admi- 
nistre sagement  nos  finances,  si  ses  employés  pré- 
posés à  la  perception  des  taxes  et  à  leur  emploi  sont, 
par  les  connaissances  et  l'expérience,  à  la  hauteur 
de  leur  position,  s'ils  font  consciencieusement  leur 
devoir. 

►  -'  .^  Qui  voyons-nous  à  la  tête  du  comité  des  finan- 
ces? L'écheviu  Hossack,  un  homme  qu'aucun  com- 
missaire nommé  par  le  gouvernement  ne  pourrait 
surpasser  pour  la  connaissance  des  affaires  et  l'in- 
tégrité. Quel  est  le  principal  officier  chargé  de  la 
gestion  des  finances  de  la  Corporation  ?  M.  Dorion, 
run  des  hommes  qui  connaissent  le  mieux  nos 
affaires  municipales.  Sa  compétence  est  si  bien  re- 
connue, que  si  le  gouvernement  nommait  des  com- 
missaires, ceux-ci  ne  pourraient  se  dispenser  de  le 
garder  pour  trésorier. 

A  côté  de  lui,  pour  surveiller  et  diriger  tous 
les  travaux  faits  sous  le  contrôle  du  conseil,  nous 
trouvons  M,  Baill?rgé,  l'un  des  ingénieurs  les^lus 
instruits  du  pays,  un  homme  qui,  dans  sa  profession, 
n'a  peut-être  d'épal  j^armi  les  Canadiens-français, 
que  M.  Trudeau  ;  un  des  hommes  enfin,  les  plus 
laborieux  et  les  plus  appliqués  que  nous  ayions. 

J'admettrai,  si  l'on  veut,  que  tous  les  employés 
préposés  aux  mêmes  services  que  les  deux  que  je 
viens  de  nommer,  n'ont  pas  leur  valeur  intellec- 
tuelle. Mais  on  tidmettra  aussi,  que  leurs  emplois 


10  — 


•ilil 


ne  sont  rien,  comparé"]}  à  ceux  de  trésorier  et  de 
surintendant  des  tmvaux,  demême  que  l'on  admet- 
tra, que  des  commissaires  ne  nommeraient  pas 
nécessairement  des  prodiges  d'employés. 

Mais  on  dit  qu'il  y  a  trop  d'employés!  Je  ne. 
suis  pas  assez  au  courant  des  détails  de  notre  admi- 
nistration municipale  pour  me  prononcer  sur  ce 
Eoint.  Tout  ce  que  je  puis  dire,  c'est  qu'avec  un 
udjet  qui  se  monte  au  sixième  de  celui  de  la 
Province  de  Québec,  notre  municipalité  a  dix  fois 
moins  d'employés. 

Que  n'a-t-6n  pas  dit  du  défaut  de  surveillance 
sur  les  employés,  lorsque  dernièrement,  on  a  appris 
qu'un  employé  venait  de  prendre  la  clef  des  champs, 
après  avoir  fait  des  détournements  au  montant  de 
deux  mille  louis.  Si  nous  avions  eu  des  commissai- 
res, disaient  une  foule  de  gens,  cela  ne  serait  pas 
arrivé.  On  a  paru  oublier  entièrement,  que  tous  les 
jours  nous  voyons  des  faits  pareils  arriver  chez  des 
particuliers,  cités  comme  des  modèles  d'ordre  et  de 
surveillance,  qu'il  n'y  a  aucune  administration 
publique  qui  n'ait  été  victime  de  détournements. 
Qui  ne  connaît  ce  qui  est  arrivé  à  la  maison  Ross  ? 
Qui  ne  sait  que  les  commissaires  du  Havre,  (oui  des 
commissaires),  ont  été  filovités  de  $2,000  il  y  a  quel* 
ques  années  ?  Qui  ne  connaît  l'alFaire  Brown,  dans 
laquelle  le  gouvernement  a  perdu  tine  trentaine  de 
mille  piastres  ?  Qui  n'a  lu  ces  jours  derniers,  qu'un 
employé  d'une  banque,dans  le  Nouveàu-Brunswick,. 
venait  de  mettre  la  froHtière  entre  lui  et  la  justice, 
après  a  voir  fait  sauter  la  caisse  et  s'être  approprié 
$200,000  ?  Qui  ne  se  rappelle  l'affaire  Lamirande  ? 
Je  pourrais  multiplier  ces  exemples.  Dans  tous  ces 
cas,  comme  dans  l'afl'aire  Doran,  il  y  avait  manque 
de  surveillance,  sans  doute.  Mais,  qui  peut  se  flatter 
de  ne  s'être  jamais  laissé  prendre  en  défaut  sur  ce 
point  ?  Il  est  impossible  de  toujours  traiter  ses 
employés  comme  si  on  les  croyait  voleurs,  et  pour- 
tant, ils  peuvent  le  devenir  d'une  minute  à  l'autre. 
On  se  récrie,  lorsqu'on  apprend  qu'un  individu 
a  été  poursuivi  pour  ses  taxes,  ayant  son  reçu  dans  ' 
sa  poche.  Mais  je  demanderai  au  marchand  auquel 
il  n'est  jamais  arrivé  d'oublier  l'entrée  d'un  paiement 


-  17  - 

dans  ses  livres,  de  jeter  la  première  pierre  à  notre  ad- 
ministration municipale.  Sans  doute,  cela  arrive  plus 
souvent  à  la  Corporation  que  chez  les  particuliers. 
Mais  il  ne  faut  pas  oublier  la  différence  qu'il  y  a  entre 
eux  et  notre  conseil  municipal.  Quel  est  l'nulividu 
qui  a  des  comptes  avec  un  dixième  du  nombre  des 
clébiteurs  de  la  Corporation  ?  Jiît,  en  supposant  que 
les  erreurs  et  les  omissions  fussent  plus  nombreuses 
ici  que  là,  on  sait  qu'il  est  impossible  de  mettre 
dans  une  administration  publique,  le  même  ordre, 
la  même  économie  que  dans  une  ac'ministration 
particulière,  il  y  manquera  toujours  ce  stimulant 
de  l'intérêt  individuel,  qui  rend  la  vue  si  perchante, 
cet  ml  du  maître,  que  rien  ne  saurait  remplacer,  dit 
le  fabuliste.  Mais  nous  n'aurions  rien  à  gagner,  à 
cet  égard,  à  la  nomination  do  commissaires.  Si 
chaque  conseiller  n'a  pas  le  stimulant  de  l'intérêt 
personnel,  il  a  la  crainte  de  ses  électeurs,  qui  peu- 
vent lui  demander  compte  de  sa  conduite  à  chaque 
instant.  Le  commissaire,  ne  devant  rien  aux  élec- 
teurs, n'en  ayant  rien  à  craindre  ni  à  attendre; 
n'aurait  à  craindre  que  le  gouvernement.  Et, 
il  ne  faut  pas  avoir  longtemps  vécu  dans  notre 
pays,  pour  savoir  combien  est  émoussé  le  glaive 
de  la  destitution  pour  un  employé  du  gouverne- 
ment, combien  de  fois  on  peut  avoir  mérité  ses 
coups  sans  qu'ils  se  fassent  s'^ntir,  combien  est 
faible  la  crainte  qu'il  inspire  !  Et  si  cela  est  vrai  de 
tous  les  employés  du  gouvernement,  même  de 
ceux  dont  l'emploi  le  touche  directement,  combien 
cela  est-il  plus  vrai  encore,  de  ceux  chargés  d'af- 
faires qui  lui  sont  aussi  étrangères  que  le  seraient 
nos  affaires  municipales  ? 

Pour  montrer  combien  sont  peu  fondés,  quel- 
ques-uns des  .reproches  les  plus  graves  que  Ton  fait 
à  notre  conseil  municipal,  je  vais  citer  un  exemple 
tout  récent.  Il  y  a  quelques  jours,  les  journaux  de 
cette  ville,  publiaient  une  annonce  du  trésorier, 
demandant  des  soumissions  pour  l'achat  de  $29,200 
piastres  du  fonds  d'amortissement  d^  notre  dette. 
On  voit  aussitôt  paraître  dans  le  Chronicle,  une 
correspondance  dans  laquelle  nos  édiles  sont  poli- 
ment traités  àefmancial  macaivbies,  parceque,  d'après 


if 

I  j 


liii 


—  18  — 

l'auteur  de  la  correspondance,  ils  aui aient  em- 
pruntu  à  lOh  pour  100  cette  somme,  pour  laquelle 
ils  ne  pourraient  trouver  plus  de  7  pour  100.  Et  là 
dessus,  notre  correspondant  de  signaler  au  ridicule 
la  bêtise  et  l'ignorance  du  conseil,  qui  n'est  pas 
capable,  suivant  lui,  de  s'apercevoir  qu'emprunter 
à  10|  pour  prêter  à  7,  n'est  pas  précisément  une 
opération  financière  propre  à  enrichir  son  auteur. 
Naturellement,  il  concluait  en  appelant  de  ses 
vœux  le  jour  où  nous  aurions  des  commissaires,  et 
probablement  que  ses  lecteurs  en  faisaient  autant. 
Or,  voulez-vous  savoir  quelle  était  la  valeur  de 
cette  accusation  V — Uabord,  il  paraît  qu'elle  avait 
pour  auteur  un  courtier  enquête  d'un  placement 
pour  un  client,  et  sur  le  chemin  duquel  était  venu 
se  mettre  le  trésorier  avec  ses  S29,200.  Puis,  la 
donnée  principale  sur  laquelle  elle  était  basée, 
savoir  le  fait  que  le  conseil  aurait  emprunté  ces 
$29,000,  était  entièrement  fausse.  Enfin,  le  corres- 
pondant, fùt-il  l'homme  le  plus  désintéressé  du 
monde,  et  les  faits  affirmés  par  lui  fussent-ils  réels, 
l'accusation  i)rouvait,  non  pas  la  capacité  financière 
du  correspondant  et  l'incap.icitô  du  conseil,  nais 
l'ignorance  grossière  de  l'accusateur  à  l'égard  de 
notre  loi  municipale.  Voici,  en  effet,  ce  que  dit 
cette  loi  :  (20  Vict  ch.  57,  section.  37.) 

19.  "  Il  sera  du  devoir  du  trésorier  de  la  cité, 
"  avant  le  premier  jour  d'octobre  de  chaque  année, 
"  de  prendre  sur  les  revenus  annuels  de  la  cité, 
"  après  paiement  de  l'intérêt  sur  tous  ses  bons  et 
"  avant  toute  autre  somme  votée,  une  somme  égale 
"  à  deux  pour  cent,  sur  le  montant  de  la  dette  con- 
"  solidée  à  cette  époque,  laquelle  somme  de  deux 
"  pour  cent  sera  ajoutée  chaque  année  au  fonds 
"  d' amortisse meiU  de  la  dette  consolidée,  avec  l'in- 
*'  térêt  de  ce  fonds,  lequel  sera  employé  à  l'achat  de 
"  débentures  du  gouvernement  provincial  ou  placé 
"  en  actions  de  banques  incorporées  en  cette  pro- 
"  vince  ott  au  rachat  des  débantures  existantes  de 
''  de  la  corporation. 

20.  "  kSi  le  trésorier  de  la  cité  manque  ou  omet 
"  de  faire  aucune  des  choses  dont  l'accomplisse- 
"  ment  est  exigé  de  lui  par  les  7  paragraphes  \)ïé- 


w 


—  19  — 

"  cédonts,  il  sera  passible  d'une  amende  de  SGOO." 
Ainsi,  ce  qu'avec  tant  d'outrecuidance,  on 
reproche  au  conseil  d'avoir  ordonné  au  trésorier, 
celui-ci  le  devait  l'aire  sans  attendre  l'ordre  de  per- 
sonne, malgré  le  conseil  lui-même,  à  peine  d'une 
amende  de  8600  ! 

Voilà  à  quoi  se  réduisent  un  grand  nombre 
des  accusations  qu'on  lance  contre  notre  régime 
municipal  :  la  loi,  ou  la  force  des  choses. 

•.,.:--.„••••  VII.  ■'::\  / 

Je  vois  venir  une  objection.  Vous  soutenez, 
me  dira-t-on,  que  notre  administration  municipale, 
sans  être  parfaite,  vaut  celle  de  Montréal  ;  vous  no 
Vf  nierez  pas  cependant,  que  tout  va  bien  mieux  dans 
cette  dernière  ville  qu'ici.  Les  principales  rues  y 
sont  dans  un  état  qu  envieraient  Londres  et  Paris  ; 
tout  le  reste  est  presqu'à  l'avenant  ;  et  pourtant, 
pendant  que  nous  avons  un  délicit  tous  les  ans, 
l'année  fiscale  se  solde  à  Montréal  par  un  excédant. 
— J'admets  tout  cela,  mais  je  soutiens  que  cela  ne 
prouve,  ni  que  noire  administriilion  c^t  mauvaise, 
ni  que  des  commissaires  feraient  mieux.  Cela 
prouve  simplement,  qu'à  Montréal  on  peut  payer 
quatre  ôhelins  avec  cinq,  et  qu'on  n'en  peut  payer 
cinq  avec  quatre  à  Québec.  En  effet,  nos  revenus 
ne  sont  que  d'environ  $300,000,  et  nos  dépenses 
nécessaires  sont  de  $259,975.9.4  ;  le  revenu  de  Mont- 
réal est  de  $700,000  et  ses  dépenses  nécessaires 
sont  de  $499,73-4.00 

J'appelle  nécessaires,  ces  dépenses  dont  aucune 
administration  ne  nous  pourrait  exempter,  qu'elle 
fût  dirigée  par  des  commissaires  ou  par  un  conseil 
électif,  parcequ'elles  sont  exigées  par  la  loi,  ou 
parcequ'elles  tiennent  à  des  circonstances  hors  du 
contrôle  de  l'administration.  Ainsi,  aucune  organi- 
sation ne  nous  pourrait  dispenser  de  payer  les  irté- 
rêts  de  notre  dette,  d'avoir  un  fonds  d'amortisse- 
ment, de  paver  et  entretenir  nos  rues,  de  maintenir 
notre  police  et  nottre  organisation  contre  les  incen- 
dies, de  contribuer  au  soutien  des  écoles  et  à  la 
garde  de  la  prison,  de  faire  assurer  et  de  chauffer 


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■       —    20    —  ;•_;,'-:;;..■:■;,;,.•,• 

no3  «^difices  publics,  de  payer  à  la  Corporation  de 
Lévis  la  moitié  du  revenu  de  la  traverse,  d'acquit- 
ter les  rentes  dont  sont  chargés  les  terrains  ^ue 
nous  possédons.  Voici  le  détail  de  ces  différents 
items  de  dépenses  pour  Québec  et  Montréal. 

.,.'y.^,.h/.'^ÀÀ /;.--.;,.     QUEBEC.     y-.-^:^'v-:'  -  -  y-;^  ■" 

Intérêts  sur  la  dette $  164,871.94 

Fonds  d'amortissement 29,200.00  ,' 

.  Police..... 19,986.50 

Organisation  contre  les  incendies..  12,027.00 

Fonds  des  écoles 11,898.00 

Garde  de  la  prison 1,600.00 

Moitié  de  la  traverse  à  Lévis 1,202.50 

Assurances 600.00     ^ 

Chauffage 1,500.00 

Eclairage 7,000.00 

Rentes  de  terrains 1,200.00 

■  y'','^'.,''-'     '  ;;'     -•.     V       ,    $250,985.94  ^ 

MONTRÉAL. 

'     Intérêts $  295,639.00 

Amortissement 72,473.00 

Police 61,672.00 

Feu 22,983.00 

Écoles 21.815.00 

Prisons 2,400.00 

Assuranceé 1,300.00 

Chauffage 3,000.00 

Eclairage 18,852.00 

Rentes  de  terrains 100.00 

\:,  -'■*■    ■■'■  --^    ''  ''■'"  •■     ■■•  '-'"■''-       $499,734.00 

Non  seulement  toutes  ces  dépenses  sont  inévi- 
tables, mais  le  plus  grand  nombre  d'entre-elles — et 
ce  sont  presaue  toutes  les  plus  fortes — sont  de  telle 
nature,  que  le  montant  même,  n'en  pourrait  être 
changé  par  aucune  adu'inistration.  Je  veux  parler 
des  items  relatifs  aux  intérêts,*  à  l'amortissement, 
aux  écoles,  à  la  traverse  et  aux  rentes  de  terrains  : 


21  — 


le  quantum  en  est  fixé  par  la  loi,  et  tous  les  co>m- 
missaires  du  monde  n'y  pourraient  rien  changer. 
Quant  à  l'item  de  la  police,  on  pourrait  presque 
dire  aussi  ciue  le  montant  en  est  lixé  par  la  loi, 
puisque  celle-ci  décide  qu'elle  se  composera  d'au 
moins  62  hommes.  D'ailleurs,  on  sait  que  le  conseil 
n'a  aucun  contrôle  sur  cette  partie  de  l'administra- 
tion. Les  items  dont  le  conseil  peut  diminuer  le 
montant  sont,  comme  on  peut  le  voir,  infiniment 
inférieurs  aux  items  correspondants  des  dépenses 
de  Montréal,  et  je  ne  crois  pas  qu'il  y  ait  uii  ennemi 
assez  acharné  de  nos  institutions  municipales  pour 
soutenir  que  $12,000  pour  notre  organisation  contre 
les  incendies  est  une  somme  exagérée,  et  que  des 
commissaires  la  pourraient  réduire. 

Voilà  donc,  sur  un  revenu  d'environ  $300,000, 
Tune  somme  de  $250,985.94  qu'aucune  administra- 
tion ne  peut  se  dispenser  de  prendre.  Il  ne  lui 
reste  donc,  pour  doter  tous  les  autres  services  muni- 
cipaux, et  faire  des  améliorations,  que  $50,000.  Or, 
ces  services  municipauy  comprennent  l'entretien, 
le  nettoyage  et  l'arrosage  des  rues  et  places  publi- 
ques, l'entretien  de  l'aqueduc  et  des  égoûts,  le 
ramonage  des  cheminées,  l'entretien  et  la  surveil- 
lance des  marchés  et  édilices  publics,  les  dépenses 
judiciaires,  les  frais  d'impression  et  d^nnonces,  la 
garde  et  l'entretien  du  quai  du  Palais,  les  salaires 
de  tous  les  employés  de  la  Corporation.  On  com- 
prend dcnc  combien  doit  être  minime,  la  somme 
consacrée  a  chacun  de  ces  services.  Ainsi,  pour 
l'entretien  des  rues,  le  conseil  ne  dispose,  cette 
année,  que  de  $12,000^  et  pour  celui  de  l'aque- 
duc et  des  égoùts  que  de  $9,482.00.  Comment  veut- 
on  qu'avec  $12,000,  on  entretienne  toutes  nos  rues 
en  bon  ordre,  qu'on  les  balaie,  qu'on  les  arrose,  et 
que,  de  plus,  on  les  améliore  en  les  pavant  ou  les 
macadamisant?  Comment  veut-on  qu'avec  $9,000, 
on  entretienne  l'aqueduc  et  les  égoùts,  et  qu'on 
fasse  des  travaux  pour  les  faire  pénétrer  dans  les 
parties  de  la  ville  qui  en  sont  privées  V 

A  Montréal,  au  contraire,  après  avoir  déduit 
toutes  les  dépenses  inévitables,  après  avoir  payé 
une  police  deux  fois  plus  nombreuse  que  la  notre, 


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il  reste  au  conseil  une  somme  de  $200,000  à  consa- 
crer aux  mêmes  services  pour  lesquels  notre  con- 
seil n'a  que  $50.000,  bien  qu'ils  soient  naturelle- 
ment aussi  dispendieux  ici  qu'à  Montréal.  Qu'y,  a- 
t-il  de  surprenant,  à  ce  que  ces  services  soient  mieux 
faits  à  Montréal  que  chez  nous,  et  à  ce  qu'on  puisse 
faire  là,  des  améliorations  qu'on  ne  fait  paâ'ici  ?  v 
.  Voilà  des  faits,  et  toutes  les  déclamations  du 
inonda ,  sur  les  abus  d'un  conseil  électif  et  sur  les 
avantages  d'une  commission  nommée  par  la  Cou- 
Tonne,  n'y  feront  rien.  Si  nous  voulons  avoir  de 
belles  rues,  si  rous  voulons  des  améliorations,  il 
faut  nous  résigner  à  voir  augmenter  les  tv  xes  dont 
nous  nous  plaignons  déjà.  Si  c'est  là  qu'en  veulent 
venir  ceux  qui  demandent  des  commissaires, 
qu'ils  le  disent,  et  le  public  verra  ce  qu'il  devra  faire. 
11  pourra  dire  s'il  aime  mieux  ôtie  saigné  aux  qua- 
tre membres,  qu'être  privé  des  améliorations  que 
l'on  voit  à  Montréal.  Si  ce  n'est  pas  là  ce  que  dési- 
rent les  adversaires  de  notre  système  municipal, 
s'ils  prétendent  qu'il  suffira  de  remplacer  le  conseil 
par  des  commissaires,  pour  nous  faire  arriver  à  la 
position  de  Montréal,  je  me  permettrai  de  leur  dire 
le  plus  poliment  possible  :  ou  bien  vous  ne  con- 
naissez pas  le  i)remier  mot  de  notre  situation  et  de 
celle  de  Molltréal,  ou  bien  vous  voulez  tromper. 

:_:.;..  :  r  ■,.,,>.,;■'-  VIII.  - .  -     ■  ^'".  --^  ^ 

Jusqu'à  présent,  je  me  suis  contenté  de  prouver 
que  des  commissaires  ne  feraient  pas  mieux  que  le 
conseil  actuel;  mais  je  xa%  plus  loin,  et  je  soutiens 
que,  non-seulement  nous  n'avons  rien  à  gagner  à 
leur  nomii'ation,  mais  que  nous  avons  tout  à  perdre. 

D'abord,  j'ai  à  peine  besoin  de  parler  du  coup 
que  cela  porterait  à  notre  crédit.  On  ne  manquerait 
pas,  à  l'étranger,  de  voir  là  le  signal  de  notre  ruine  ; 
la  commission  y  passerait  pour  une  commission  de 
banqueroute. 

ruis,  l'administration  par  des  commissaires 
comme  ceux  qu'on  nous  voudrait  faire  donner,  est 
la  plus  mauvaise  que  l'on  puisse  imaginer.  Ce  qui 
fait  un  bon  administrateur,  ce  n'est  pas  le  talent 


i^V- 


-  23  — 


seulement,  c'est  de  plus  l'hounéteté,  et  surtout  l'in- 
térêt ou  la  responsabilité.  Je  suppose  que  le  gou- 
vernement, dans  la  nomination  des  commissaires, 
ne  se  laissera  pas  inlluencer  par  des  considérations 
politiques  ;  je  suppose  qu'il  nommera  les  hommes 
les  plus  capables,  que  les  commissaires  seront  les 
plus  honnêtes  gens  du  monde,  qu'ils  n'emploieront 
pas  notre  argent  à  faire  élire  leurs  amis,  et  ne  don- 
neront pas  les  emplois  aux  créatures  de  ceux  qui 
les  auront  fait  nommer  ;  quel  intérêt  auront-ils  à 
faire  tous  leurs  efforts  pour  bien  administrer  ?  Leur 
salaire  sera  assuré  dans  tous  les  cas,  et  personne  ne 
pourra  savoir  s'ils  réussissent  ou  non.  Quant  à  la 
responsabilité,  elle  sera  nulle  en  réalité.  Nous 
serons  les  seuls  intéressés,  et  les  commissaires  ne 
uous.rendront  aucun  compte.  Ils  ne  seront  respon- 
sables qu'au  gouvernement.  Et  veut-on  savoir  à 
quoi  se  réduira  cette  responsabilité  ?  A  préparer 
un  rapport  et  à  l'envoyer  au  secrétariat  de  la  Pro- 
vince, où  l'on^'^  contentera  de  jeter  les  yeux  dessus 
et  de  dire  aiusi-soit-il,  si  l'on  ne  le  jette  pas  plutôt 
immédiatement  au  panier.  Qu'arrivera-t-il  ?  C'est 
qu'au  bout  de  six  mois,  les  commissaires  ne  s'assem- 
bleront plus  que  pour  la  forme.  Ils  se  contenteront 
de  demander  à  leur  secrétaire  comment  vont  les 
choses  ;  le  secrétaire  leur  dira  que  tout  est  à  mer- 
veille ;  pnis  ils  se  frotteront  les  mains,  toucheront 
leur  salaire  et  s'en  iront  à  leurs  affaires.  Tout  conti- 
nuera d'aller  ainsi  pendant  quelque  temps.  Puis  un 
bon  matin,  nous  apprendrons  que  les  commissaires 
n'ont  pas  payé  les  intérêts  dus  à  nos  créanciers,  et 
que  le  shérif  va  nous  faire  l'honneur  d'une  visite,  si 
nous  ne  nous  hâtons  pas  de  nous  taxer  pour  lui 
remettre  la  somme  qu'il  est  chargé  de  prélever. 
Nous  aurons  beau  nous  lamenter,  il  faudra  d'abord 
payer,  et  les  commissaires,  qui  auront  eu  la  précau- 
tion de  toucher  leur  salaire  répondront  à  toutes  nos 
IDiaintes  :  que  voulez-vous  que  je  fasse  ?  ce  n'est  pas 
ma  faute. 

Que  l'on  ne  croie  pas  que  je  fais  là  des  supposi- 
tions imaginaires.  On  nous  a  toujours  cité  les  mira- 
cles opérés  par  des  commissaires  à  Glasgow;  mais 
je  soupçonne  que  le  procès  de  canonisation  de  ces 


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24  — 


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II 


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messieurs  n'a  pas  été  parfaitement  régulier,  puis- 
qu'on ne  nous  en  donne  pas  les  pièces.  Je  citerai,  * 
moi,  des  prodiges  opérés  par    des  commissaires 
tissez  rapprochés  de  nous,  pour  que  chacun  puisse 
contrôler  ce  que  je  vais  dire. 

Il  n'est  pas  nécessaire  d'aller  à  Glasgow,  pour 
trouver  des  commissioiis  nommés  par  le  gouverne- 
ment. Nous  en  avons  deux  au  milieu  de  nous  :  la 
commission  du  Havre  de  Québec,  et  la  commission 
des  chemins  à  barrières  de  la  rive  Nord.  Or,  vou- 
lez-vous savoir  les  merveilles  opérées  par  ces  deux 
commissions  ?  Adressez-vous  aux  porteurs  de  leurs 
bons,  et  ils  vous  édifieront  complètement  sur  ce 
point.  Ils  vous  diront  que,  pendant  que  les  bons  7 
pour  cent  de  la  Corporation  se  vendent  jusqu'à  98, 
les  bons  8  pour  cent  de  la  commission  du  IJâvre 
ont  peine  à  trouver  des  acheteurs  à  75,  les  bons  6 
pour  cent  privilégiés  de  la  commission  des  che- 
mins à  50;  les  bons  non  privilégiés  de  cette  der- 
nière, valent  un  peu  moins  que  si  le  papier  sur 
lequel  ils  sont  imprimés  était  encore  du  papier 
blanc  ! 

Lors  donc  que  je  vois  aller  cherchera  Glasgow 
des  exemples  de  commissions,  pendant  que  nous 
en  pouvons  trouver  si  près  de  nous,  je  suis  tenté  • 
de  croire  que  ceux  qui  agissent  ainsi,  font  comme 
les  vendeurs  de  drogues,  qui  citent  les  cures  mer- 
veilleuses opérées  en  Chine  par  leurs  pillules, 
mais  qu^e  gardent  bien  de  dire  combien  de  per- 
sonnes ailleurs  elles  ont  conduites  de  vie  à  trépas. 


IX 


■j^ 


Ce  n'est  donc  pas  dans  la  nomination  de  com- 
missaires, que  nous  devons  chercher  un  remède 
aux  maux  dont  nous  nous  x^laignons.  Si  nous  vou- 
lons trouver  ce  remède,  commençons  par  étudier 
l'orio-ine  et  la  cause  de  lu  situation  embarrassée  où 
nous  sommes. 

Bien  que  notre  administration  municipale  ne 
soit  p.is  plus  mauvaise  aujourd'hui  qu'autrefois, 
elle  n'a  pas  toujours  soulevé  les  récriminations 
auxquelles  elle   a  été   en   butte  depuis  quelques 


..  •   » 


—  25  — 


années.  Pendant  longtemps  nos  dépenses  ont  été 
modiques,  et  la  propriété  avait  un  prix  élevé.  Des 
taxes  légères  suffisaient  alors  pour  couvrir  toutes  nos 
dépenses.  En  même  temps  nous  avions  de  l'argent 
pour  les  payer.  L'industrie  vitale  de  Québec,  la 
construction  des  navires,  était  dans  un  état  floris- 
sant,et  la  Corporation  faisait  faire  les  grands  travaux 
de  l'aqueduc.  Nos  ouvriers  trouvaient  donc  un 
emploi  constant  et  un  salaire  élevé.  Le  commerce 
se  ressentait  naturellement  de  cet  état  de  choses, 
et  il  arriva  à  un  haut  degré  de  prospérité.  On  vit 
certaines  rues,  à  St.  Iloch  surtout,  se  garnir  de  ma- 
gasins nouveaux.  On  se  plaine  rarement  des  taxes, 
lorsqu'on  a  de  l'argent  pour  les  payer.  Comme  tout 
le  monde  alors  en  avait,  on  n'entendait  aucune 
plainte  contre  notre  administration  municipale,    v 

Mais  notre  prospérité  avait  un  fondement  peli 
solide.  Lorsqu'une  ville  a  un  grand  nombre  d'in- 
dustries, à  moins  d'une  crise  financière  comme 
celle  de  1857,  une  de  ces  industries  peut  être  para- 
lysée, mais  il  en  reste  assez  d'autres  pour  fournir 
du  travail  à  la  population  ouvrière,  Telle  est 
aujourd'hui  la  position  de  Montréal  ;  qa'une  des 
nombreuses  industries  qui  y  sont  exploitées  soit 
arrêtée  pendant  un  certain  temps,  le  mouvement 
général  des  affaires  à  peine  en  sera  ralenti.  Mais 
bien  différente  était  notre  position.  Nous  n'avions, 
à  proprement  parler,  et  je  puis  dire  nous  n'avons 
encore,  qu'une  grande  industrie  capable  de  donner 
du  travail  à  notre  population  ouvrièi»e.  Bien  que 
cette  industrie  eut  ressenti  le  contrecoup  de  la 
crise  de  1857,  nous  avions  pu,  grâce  aux  épargnes 
faites  auparavant,  grâce  aussi  en  partie  aux  travaux 
exécutés  par  la  Corporation,  attendre  la  reprise  des 
affaire^  Mais,  que  cette  industrie  tombât  ou  même 
fut  suspendue  pendant  longtemps,  et  nous  étions 
perdus.  ^  'V 

C'est  ce  qui  arriva.  La  construction  des  navi- 
res, après  avoir  pris,  en  1862  et  1863,  un  dévelop- 
pement qu'elle  n'avait  pas  atteint  depuis  longtemps, 
commença  bientôt  à  décliner.  La  guerre  civile  des 
Etats-Unis  était  arrivée  à  son  plus  haut  degré 
d'acharnement.     Les   Etats    Confédérés    avaient 


—  26  — 

lancé  sur  l'Océan  des  corsaires  qui  harcelaient 
sans  cesse  les  vaisseaux  de  commerce  des  Etats  du 
Nord.  Bientôt  les  navires  furent  si  exposés  sous  le 
pavillon  fédéral,  que  leurs  propriétaires  les  vendi- 
rent en  Angleterre.  Les  plus  beaux  navires  du  com- 
merce des  Etats-Unis  vinrent  donc  faire  concur- 
rence aux  nôtres,  sur  \e  marché  des  Iles  Britan- 
niques. Qu'on  ajoute  à  cela  que,  la  guerre  ayant 
diminué  le  commerce  entre  l'Angleterre  et  les 
Etats-Unis,  le  fret  entre  les  deux  continents  dut 
tomber,  que  la  construction  des  vaisseaux  en  fer 
prit,  vers  le  même  temps,  un  grand  développement, 
et  l'on  comprendra  la  baisse  énorme  qui  eut  lieu 
dans  le  prix  des  navires  en  bois.  La  construction 
des  vaisseaux  alla  en  déclinant.  Une  grande  partie 
de  la  population  ouvrière  qu'elle  avait  appelée  ici, 
se  trouA^a  sans  ouvrage.  V  ers  le  même  temps,  le 
gouvernement  s'en  allait  à  Ottawa,  nous  privant 
d'une  population  de  3,000  âmes  et  de  l'argent 
qu'elle  jetait  parmi  nous. 

C'est  alors  que  les  faillites  devinrent  à  l'ordre 
du  jour,  que  l'on  vit  les  magasins  se  lermer  par 
douzaine,  et  des  milliers  de  maisons  privées  de  loca- 
taires. La  valeur  de  la  propriété  foncière  tomba  à 
un  taux  ridicule.  La  principale  source  de  revenu 
de  notre  administration  municipale,  fut  diminuée  en 
conséquence.  D'un  autre  côté,  nos  dépenses  avaient 
augmenté.  Il  fallait  payer  les  intérêts  des  sommes 
dépensées  en  améliorations  publiques  au  temps  de 
notre  prospérité.  C'est  alors  que  commencèrent  les 
déficits.  Il  aurait  fallu  pour  les  combler  augmenter 
les  taxes,  et  nous  avions  déjà  peine  à  payer  celle» 
dont  nous  étions  chargés.  Des  gens  intéressés  à 
déprécier  notre  administration  municipale,  se 
mirent  à  lui  attribuer  un  état  de  choses  d»nt  elle 
était  aussi  innocente  cjue  l'administration  du 
Céleste  Empire.  Comme  il  arrive  toujours  lorsqu'on 
ne  sait  pas  à  qui  s'en  prendre  du  malaise  que  l'on 
ressent,  le  public  se  jeta  sur  la  premiôie  cause 
qu'on  lui  signala,  et  la  Corporation  fut  la  victime 
sur  laquelle  s'exhala  son  mécontentement. 

Voilà  l'orio-ine  de  toutes  les  accusations  dont 


iiiiii 


j  I 


—  27  — 

notre  administration  municipale  a  été  l'objet,  et  la 
cause  véritable  de  la  situation  embarrassée  de  nos 
affaires. 

X. 


Avoir  signalé  ïa  cause  de  l'état  de  choses  dont 
nous  nous  plaignons,  c'est,  semble-t-il,  avoir  indi- 
que le  remède  à  y  appliquer.  En  effet,  nos  taxes 
sont  trop  lourdes  pour  nos  moyens,  et  ne  suffisent 
pas  encore,  eh  bien  !  augmentons  la  valeur  de  la 
propriété,  pour  faire  rendre  davantage  à  l'impôt  ; 
augmentons  les  moyens  pécuniaires  de  ceux  qui 
l'ont  à  payer,  en  établissant  des. industries  nouvel- 
les à  la  place  de  celle  de  la  construction  des  navi- 
res qui  s'en  va,  en  ouvrant  des  manufactures. 
Cela  donnera  du  travail  à  notre  population  ouvrière  ; 
celle-ci  consommera  des  marchandises  et  pourra  les 
payer  ;  le  commerce  deviendra  prospère.  Nous 
verrons  se  rouvrir  les  magasins  qui  sont  fermés 
depuis  quelques  années,  les  maisons  inhabitées 
trouveront  des  locataires,  la  propriété  foncière  re- 
prendra la  valeur  qu'elle  a  perdue. 

Voilà  sans  doute  ce  qu'il  iaudrait  faire.  Mais 
pouvons-nous  compter  qu'on  le  fera  ?  Il  faudrait 
pour  cela  peu  connaître  nos  capitalistes.  A  Mont- 
réal, dès  qu'un  individu  a  acquis  une  certaine  for- 
tune dans  le  commerce,  il  se  hâte  de  l'employer  à 
soutenir  l'industrie  locale,  à  maintenir  dos  manu- 
factures. Il  se  construit  un  palais  pour  ses  affai- 
res et  un  autre  pour  sa  résidence.  Ses  capitaux 
sont  employés  à  donner  de  l'emploi  aux  ouvriers,  à 
augmenter  la  prospérité  locale,  à  donner  de  l'essor 
au  commerce,  de  la  valeur  à  la  propriété  foncière. 
On  pourrait  presque  dire  que,  sur  chaque  louis  qu'il 
gagne,  le  marchand  de  Montréal  met  un  chelin 
dans  la  caisse  municipale. 

v^ue  font  nos  capitalistes,  au  contraire  ?  A  quel 
usapfe  emploient-ils  leurs  capitaux  ?  A  spéculer  sur 
les  fonds  publics,  ou  à  faire  le  commerce  de  bois. 
Or,  je  vous  le  demande,  quel  profit  retire  Québec 
de  l'argent  qu'un  de  ses  capitalistes  aura  placé,  par 
exemple,  en  rentes  sur  l'Etat  ?  Exactement  le  même 
profit  qu'en  retirent  Montréal  et  Toronto.  Nous 


!     I 


!        I 


III 


.:l|i  ! 


—  28  —     '■  ■  ■•     '    ' 

devenons  ainsi,  pour  ainsi  dire,  les  bailleurs  de 
fonds  de  tout  le  pays  ;  nous  lui  donnons  à  exploiter 
des  capitaux  que^nous  aurions  dû  garder  pour  nous. 
Quelle  ricliesse  nous  procure  le  commerce  de  boi«  ? 
Il  donne  de  l'emploi,  pendant  une  partie  de  l'été,  à 
quelques  centaines  d'ouvriers  venus  souvent  de  la 
campagne  ;  il  absorbe,  en  revanche,  presque  tous 
les  capitaux  de  nos  banques,  qu'il  ferme  ainsi  à 
l'industrie  et  au  commerce  local  ;  il  fait  passer  de- 
vant nous  de  grosses  sommes  d'argent,  mais  il  ne 
nous  en  laibsc  rien. 

Qu'on  ne  croie  pas  que  j'exagère;  qu'on  ne 
dise  pas  que  le  capitaliste  qui  se  livre  au  Stock-Job- 
bin^^  et  que  le  marchand  de  bois,  nous  donnent  au 
moins  les  revenus  de  leurs  capitaux  en  loyers  de 
bureaux  ou  de  maisons,  en  salaires  d'employés.  On 
sait  que  ces  deux  espèces  de  commerce  demandent 
un  personnel  très-peu  nombreux.  Tel  individu,  qui 
fait  des  affaires  pour  une  centaine  de  mille  louis, 
n'aura  que  quelques  commis.  D'un  autre  côté,  il 
n'a  le  plus  souvent  pour  bureau  à  la  Basse-Ville, 
qu'une  vieille  masure  pour  laquelle  il  paie  un 
loyer  minime.  Quant  à  sa  résidence,  souvent  il 
n'en  aura  aucune,  et  logera  dans  une  pension  en 
été,  et  ira  passer  l'hiver  dans  le  Haut-Canada  ou 
en  Angleterre,  où  il  dépensera  ce  qu'il  aura  gagné 
au  milieu  de  nous.  S'il  élit  domicile  ici,  il  aura  soin 
de  louer  une  maison  aussi  modeste  que  possible; 
ou  bien,  s'il  veut  vivre  avec  le  luxe  que  lui  per- 
mettent ses  moyens,  il  aura  une  villa  magiiifique 
sur  le  chemin  du  Cap-Rouge,  à  la  Petite-Jlivière, 
sur  la  route  de  Charlesbourg,  ou  à  la  Canardière, 
mais  en  dehors  des  limites  de  la  ville.  Il  en  sortira, 
non  pas  pour  venir  payer  des  taxes  à  notre  caisse 
municipale,  mais  pour  venir  user  avec  les  roues  de 
son  carrosse,  des  ruos  entretenues  avec  les  taxes  que 
paie  le  pauvre  piéton  qu'il  éclabousse.  Qu'il  égra- 
tiçne  le  vernis  de  sa  voiture,  vous  le  voyez  jeter  des 
cris  de  paon  ;  il  dénonce  à  tout  l'uni^'^ers  notre  es- 
prit rétrograde,  et  signale  la  mauvaise  administra- 
tion de  nos  affaires  municipales.  Il  s'occupe  peu  de 
nous  compromettre  aux  yeux  de  l'étranger,  puis- 
qu'il n'est  parmi  nous  le  plus  souvent  qu'à  titre 
d'oiseau  de  passage. 


îlliijIP 

I 


—  29  — 


La  seule  chose  qui  l'occupe,  c'ef  t  de  faire  de 
l'argent,  de  nous  exploiter,  de  rérlamer  des  amélio- 
rations publiques,  d'en  user  quand  elles  sont  faites, 
mais  de  ne  rien  donner  pour  les  payer.  Aussi,  s'il 
se  voit  menacé  J'être  obligé  d'y  contribuer,  vous  le 
verrez  se  mêler  au  peuple  qu'il  dédaigne  au  temps 
des  élections,  et  tâcher  d'exploiter  son  méconten- 
tement. Qu'on  veuille  bien  se  rappeler  ce  qui  est 
arrivé,  lorsque  l'on  a  proposé  la  taxe  sur  le  revenu. 


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>^  ù,i  ■ 


XII. 


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^r 


L'égoismo  de  la  plupart  de  nos  capitalistes 
nous  est  donc  trop  bien  connu,  pour  que  nous  puis- 
sions espérer  les  voir  ouvrir  do  nouvelles  industries, 
relever  le  commerce  et  donner  do  la  valeur  à  la 
propriété  foncière.  Nous  devons  chercher  d'autres 
moyens  d'augmenter  nos  revenus. 
"  (  Ce  ne  peut  être  par  de  nouvelles  taxes,  puisque 
celles  que  nous  avons  sont  déjà  trop  onéreuses  ;  ce 
doit  être  en  augmentant  le  nombre  des  contribua- 
bles, et  en  répartissant  mieux  les  taxes  entre  eux. 

Voici  les  réformes  qui,  suivant  moi,  pourraient 
augmenter  nos  revenus  assez,  non-seulement  pour 
nous  permettre  de  faire  face  à  nos  affaires,  mais 
pour  nous  mettre  en  état  de  faire  des  améliorations. 

La  première  consisterait  à  étendre  les  lin.ites 
delà  ville  jusqu'au  Cap-Iiouge,  à  la  Petite  Rivière 
et  à  la  Canardière.  Nous  forcerions  ainsi  à  contri- 
buer aux  dépenses  que  nous  faisons  pour  notre 
police,  notre  brigade  du  feu  et  nos  rues,  une  foule 
de  gens  auxquels  elles  no  coûtent  rien  et  rapportent 
autant  qu'à  nous. 

k..,..iOn  m'objectera  peut-être,  qu'il  serait  injuste  de 
faire  contribuer  ces  personnes  au  service  des  inté- 
rêts de  notre  dette  municipale.  —  Je  répondrai 
d'abord,  que  cette  dette  a  été  contractée  pour  des 
améliorations  dont  elles  profitent  comme  nous.  Et, 
êi  l'on  ne  trouve  pas  cette  réponse  suffisante,  on 
pourrait  ôter  tout  fondement  à  l'objection,  en 
déchargeant  les  territoires  qu'on  annexerait,  de  la 
part  de  taxes  afférente  au  ser\'ice  des  intérêts  de  la 
dette  de  Québec. 


11.1 


il 


é 


—  30  —   .  • 

'  Ce  tte  première  réforme  augmenterait  nos  reve- 
nue, en  augmentant  le  nombre  des  contribuables. 
Mais,  pour  que  notre  organisation  municipale  soit 
satisfaisante,  il  faut  encore  d'autres  réformes.  Nous 
entendons  tous  les  jours,' des  contribuables  se  plain- 
dre de  l'énormitô  des  taxes  qu'ils  paient.  Ces  plain- 
tes sont  très-souvent  bien  fondées.  Un  ^rand 
nombre  de  contribuables  paient  des  taxes  qui  sont 
certainement  hors  de  proportion  avecleurs  ressour* 
ces.  Faut-il  en  conclure  que  le  total  des  taxes  est 
trop  élevé,  et  qu'il  le  faudrait  réduire  ?  Evidem- 
ment non  :  j'ai  prouvé  que  le  montant  entier  des 
taxes  prélevées  par  la  Corporation,,  est  insuffisant 
pour  payer  les  dépenses  incontrôlables  qu'elle  doit 
faire,  et  effectuer  les  améliorations  dont  nous  avons 
besoin.  J'ajouterai  môme,  que  le  total  des  taxes  per- 
çues par  la  Corporation  de  Québec,  est  relativement 
moins  élevé  qu'à  Montréal  ;  en  un  mot,  je  soutiens 
que  le  fardeau  des  taxes  est  plus  lourd  à  Montréal 
que  chez  nous. 

Comment  alors,  allez-vous  dire,  expliquez-vous 
ce  fait  indéniable  que,  pendant  que  les  contribua-- 
blés  se  plaignent  ici  qu'ils  sont  ruinés  par  les  taxes, 
on  ne  les  entend  rien  dire  à  Montréal.  L'explication 
de  ce  fait  est  très  simple.  D'abord,  il  y  a  beaucoup 
moms  d'esprit  public  ici  qu'à  Montréal  :  pendant 
que,  dans  cettb  dernière  ville,  vous  ne  verrez  jamais 
un  citoyen  à  l'aise  se  plaindre  des  taxes  qu'il  paie, 
ceux  que,  chez  nous,  vous  voyez  crier  le  plus  fort 
contre  les  taxes,  sont  souvent  des  individus  qui  ne 
paient  pas  la  moitié  des  taxes  qu'ils  devraient  payer 
d'après  leurs  moyens. 

Mais,  pour  être  juste,  on  doit  admettre  qu'un 
grand  nombre  de  contribuables,  qui  ne  manquent 
pas  d'esprit  public,  ont  raison  de  se  plaindre  des 
taxes  qu'ils  paient.  Comment  alors,  concilier  cette 
admission  avec  ce  que  j'ai  dit  plus  haut,  savoir: 
que  le  total  des  taxes  i)erçues  par  la  Corporation 
n'est  pas  trop  élevé  ?  La  chose  est  facile  :  si  le  total 
des  taxes  n'étant  pas  trop  élevé,  beaucoup  de  con- 
tribuables paient  plus  que  ne  le  permettent  leurs  res- 
sources, c'est  que  ce  total  est  mal  réparti  entre  ceux 
qui  le  doivent  payer.  Nous  devons  donc  chercher  à 


m 


—  31  — 

arriver,  non  pas  à  une  réduction  du  montant  actuel 
des  taxes,  mais  à  une  meilleure  répartition  de  cel- 
les-ci entre  les  contribuables.  ' 

Quels  moyens  devons-nous  prendre,  pour  arri- 
ver à  une  répartition  plus  équitable  que  celle  que 
nous  aA'^ons  aujourd'hui  ?  Le  seul  qui  puisse  don- 
ner satisfaction  à  tout  le  monde  et  qui  soit  rationnel, 
c'est  do  répartir  .  'S  taxes  d'après  le  revenu  de  ceux 
qui  les  doivent  payer.  Mais  il  ne  suffit  pas  de  poser 
le  principe  de  la  taxe  sur  le  revenu  ;  le  plus  difficile 
est  d'en  venir  à  l'application.  Tout  le  monde  est 
d'accord  sur  le  principe,  mais  les  divergences  com- 
mencent dès  qu'il  s'agit  de  le  mettre  en  p^  atique. 
D'après  quel  revenu  repartir  les  taxes  ?  Un  i  idividu 
peut  tirer  des  revenus  de  ses  propriétés  foncières, 
de  ses  capitaux,  de  son  travail,  de  son  industrie. 
Doit-on  compter  le  revenu  de  toutes  ces  sources  que 
peut  avoir  chaque  contribuable  ?  Ainsi,  par  exemple, 
doit-on  taxer  un  individu  qui  réside  à  Lé  vis,  mais 
qui  fait  des  affaires  ici,  sur  tout  le  revenu  qu'il  peut 
avoir,  même  sur  celui  qui  proviendrait  de  proprié- 
tés foncières  situées  à  Lévis  ou  ailleurs  ?  Ce  n'est 
pas  tout  :  étant  admis  que  nous  allons  taxer  tel  con- 
tribuable d'après  tel  revenu,  il  reste  à  constater  le 
montant  de  ce  revenu. 

Ainsi,  de  quel  revenu  doit-on  tenir  compte, 
comment  le  constater,  voilà  deux  questions  dont  la 
solution  doit  précéder  l'adoption  do  toute  taxe  sur 
le  revenu,  et  dont,  autant  que  je  puis  le  savoir,  les 
partisans  de  la  taxe  sur  le  revenu  ne  se  sont  pas  ou 
se  sont  peu  occupés.  Je  vais  essayer  de  les  résoudre. 

XIIL  : 

D'abord,  de  quel  revenu  doit-on  tenir  compte 
dans  la  répartition  des  taxes  municipales  ?  Toute 
taxe  légitime  est  fondée  sur  le  principe  qu'elle  doit 
profiter  à  ceux  qui  la  paient,  en  servant  à  payer 
certaines  dépenses  qui  leur  rapportent  des  avanta- 
ges. Nous  ne  devons  donc  faire  contribuer  à  nos 
taxes  municipales,  que  ceux  qui  retirent  quelque 
utilité  des  dépenses  qu'elles  sont  destinées  à  payer, 
NC'est-à-dire,  de  notre  organisation  locale  et  de  son 


—  82  — 


m 


fonctioinioment.  Do  plus,  chacun  doit  contribuer 
dans  la  proportion  de  ses  ressources  et  de  l'utilité 
qu'il  retire  des  dépejises  communes. 

A  qui  pr  Mitent  les  dépenses  de  la  Corporation  ? 
A  ceux  c[Ui  résident  dans  les  limites  d*^  la  ville  ;  à 
ceux  qui,  sans  y  résider,  y  exercent  un  commerce 
ou  une  industrie,  y  ont  des  propriétés  fon- 
cières ou  des  capitaux.  Tous  ceux-là  donc  devraient 
payer  des  taxes.  Mais,  dans  quelle  proportion  cha- 
cun d'eux  devrait-il  en  payer  ?  Le  contribuable 
domicilié  ici  y  consomme  généralement  tout  sou 
revenu,  de  quelque  source  qu'il  provienne.  Plus  ce 
revenu  est  élevé,  plus  grands  sont  les  avantages 
qu'il  retire  de  notre  organisation  municipale.  On 
devrait  donc  tenir  compte  de  tout  son  revenu. 

Le  contribuable  non-résident  en  profite,  lui, 
dans  la  protection  et  les  avantages  qu'il  y  trouve, 
soit  pour  les  propriétés  Ibncières  ou  les  capitaux 

?u'il  y  a,  soit  pour  la  profession,  le  commerce  ou 
industrie  qu'il  y  exerce.  On  devrait  donc  tenir 
compte  à  son  éçard,  seulement  du  revenu  qu'il  tire 
des  lîropriétés  lonciùres  ou  des  capitaux  qu'il  a,  de 
la  profiîssion,  du  commerce  ou  de  l'industrie  qu'il 
exerce  parmi  nous. 

Voilà  une  solution  dont  personne,  je  crois, 
ne  viendra  contester  l'équité.  Nous  savons  donc 
quel  est  le  revenu  des  contribuables,  dont  il 
devrait  être  tenu  compte  dans  la  répartition  des 
taxes  municipales.  Voyons,  maintenant,  quels 
moyens  il  faudrait  prendre  pour  constater  ce 
revenu. 

On  pourrait  l'établir  en  faisant  une  enquête 
minutieuse  dans  chaque  cas.  Mais,  outre  que  ce 
moyen  serait  peu  sur,  très-coûteux  et  très-long,  il 
aurait  quelque  chose  de  vexatoire  et  d'incommode, 
surtout  pour  le  commerce.  Aussi,  les  adversaires  de 
la  taxe  sur  le  revenu,isupposant  qu'on  remploi!?rait, 
en  ont  fait  leur  meilleur  argument  contre  un  sys- 
tème dont  ils  n'osent  nier  la  justesse  en  théorie.  Si 
donc  nous  voulons  avoir  quelque  chance  de  voir  la 
législature  adopter  la  taxe  sur  le  revenu,  commen- 
çons par  déclarer  que  nous  n'entendons  pas  adop- 
ter ce  moyen  de  constatation. 


—  sa- 


le 


On  pourrait  encore  constater  le  revenu  de 
chaque  contribuable  par  sa  déclaration  sous  ser- 
ment. Mais,  outre  que  l'homme  le  plus  honnête 
peut  être  dans  l'impossibilité  de  dire  le  montant 
exact  de  son  revenu,  les  honnêtes  gens,  avec  ce 
système,  paieraient  pour  ceux  qui  trouvent  ua 
parjure  moins  coûteux  qu'un  paiement. 

Tout  mode  de  constatation  directe  du  revenu 
d'après  lequel  doivent  être  réparties  les  taxes,  est 
donc  impossible.  Mais  il  est  facile  de  trouver  des 
moyens  indirects,  qui  donneraient  d'une  manière 
au  moins  très- approximative  —  et  l'on  ne  peut 
exiger  davantage — le  revenu  de  chaque  contrioua- 
ble. 

J'ai  divisé  les  contribuables  en  deux  classes  *! 
résidents,  non-résidents  ayant  des  propriétés,  des 
capitaux,  faisant  des  affaires.  Pour  chacune  de  ces 
classes,  on  peut  trouver  un  mode  très-sûr  et  très- 
approximatif  de  constatation  indirecte. 

Commençons  par  le  contribuable  résident.  On 
Suit,  qu'en  général,  chacun^vit  suivant  ses  moyens  : 
c'est  sur  ceux-ci  que  chacun  règle  ses  dépenses 
de  loyer,  de  domestiques,  d'équipages.  L'expérien- 
ce enseigne  que,  pour  qu'un  homme  puisse  vivre 
sans  entamer  ses  capitaux,  il  faut  qu'il  ne  consacre 
pas  aux  trois  objets  que  je  viens  de  mentionner, 
plus  qu'une  certaine  proportion  de  ses  revenus. 
Cette  proportion  est  d'autant  moins  élevée  que  le 
revenu  est  plus  considérable.  Il  faudrait  tenir  compte 
de  cette  considération.  Ainsi,  celui  dont  le  revenu 
ne  dépasse  pas  mille  louis,  en  dépense  environ  le 
quart  pour  tes  causes  que  nous  venons  de  voir  ;  ce- 
lui doiit  le  revenu  est  entre  mille  et  deux  mille 
louis,  n'en  dépense  pas  plus  du  sixième  de  cette 
manière  ;  celui  dont  le  revenu  dépasse  trois  mille 
louis,  en  dépense  ainsi  au  plus  le  huitième. 

Ceci  connu,  voici  ce  qu'on  peut  ftiire.  Il  est  fa- 
cile de  connaître  la  valeur  locative  de  la  mai- 
son qu'occupe  un  individu,  ce  qu'il  dépense 
pour  ses  serviteurs  et  domestiques,  et  pour  ses 
équipages.  On  additionnerait  ces  dépenses,  et  si 
elles  ne  dépassaient  pas  iî250,  le  revenu  de  celui 
qui  les  ferait  serait  présumé  quadruple  de  la  som- 


34 


'i'ii: 


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II 


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Ilhi  {I      I 


li!i 


me  à  laquelle  elles  monteraient  ;  si  elles  se  montaient 
a  plus  de  .£250.  mais  à  moins  de  iî375,  le  revenu 
serait  présumé  être  de  .£2000  ;  et  si  elles  montaient 
à  iI375  ou  plus,  le  revenu  serait  présumé  être  de 
c£3000  au  moins. 

Le  moyen  que  je  viens  d'indiquer,suflirait  pour 
indiquer  la  proportion  suivant  laquelle  les  contri- 
buables résidents  devraient  payer  des  taxes.  Il  dis- 
penserait de  savoir  le  revenu  qu'ils  peuvent  tirer  de 
leurs  propriétés  foncières,  de  leurs  capitaux,  de  leurs 
industries,  puisque  l'on  aurait  ainsi  leur  revenu  e^ 
entier.  V  ï  '    '  '  ,  "         .■  ' 

Qviant  aux  résidents  qui  ne  tiennent  pas  mai; 
son,  on  sait  qu'il  doit  exister  une  certaine  propoi- 
tion  entre  leur  pension  et  leur  revenu  ;  on  pour- 
rait donc  prendre  comme  point  de  départ,  le  prix 
de  la  î^ension  qu'ils  ont,  soit  qu'ils  la  paient,  soit 
qu'elle  leur  soit  donnée  gratuitement.  Il  s'a<çit,  là 
encore,  d'une  chose  dont  la  constatatior.  e^it  facile. 

Voilà  pour  les  résidents.  Quant  aux  non-rési- 
dents, il  faut  distinguer  entre  eux,  ceux  qui  ont 
des  propriétés  foncières,  ceux  qui  ont  des  capitaux, 
et  ceux  qui  exercent  une  profession,  une  industrie, 
ou  qui  font  un  commerce. 

Commençons  par  ceux  qui  ont  des  propriétés 
foncières.  Il  est  facile  de  déterminer  le  revenu  pro- 
bable de  ces  propriétés,  Il  suffit  pour  cela  d'en  pren- 
dre la  valeur  locative,  et  de  déduire  de  celle-ci  un 
certain  percentage,  pour  frais  d'entretien,  usure, 
taxes  et  assurances. 

Les  capitaux  des  non-résidents  sont  placés  en 
actions  ou  en  bons  de  compagnies  commerciales  ou 
industrielles,  ou  bien  sur  hypothèques,  ou  bien  eh 
créances  que  n'assure  aucune  garantie  réelle.  Il 
n'est  pas  nécessaire  de  chercher  le  revenu  des  capi- 
taux placés  dans  des  compagnies  de  commerce  ou 
d'industrie  :  nous  savons  que  ces  compagnies  elles- 
mêmes  doivent  être  taxées  d'après  leurs  revenus, 
et  nous  "^errons  dans  un  instant  comment  on  peut 
constater  ces  revenus.  Il  ne  reste  donc  que  les 
capitaux  placés  sur  hypothèque,  ou  en  simples 
créances.  Le  revenu  des  premiers"  peut  être 
facilement  connu,  en  recourant  au  bureau  d'enre- 


—  35  — 


gistrement.  Quant  au  revenu  des  créances  non 
assurées  par  des  hypothèques,  je  ne  vois,  je  l'avoue, 
■aucun  moyen  de  le  connaître  ;  mais  ou  sait  qu'il 
est  très-peu  considéra))le,  et  d'un  caractère  trop 
transitoire  pour  servir  d'assiette  à  une  taxe. 

:  Nous  n'avons  donc  plus  à  trouver,  que  le  moyen 
de  constater  le  revenu  proA  enant  de  l'exercice,  soit 
par  un  individu  non  r'jsident,  soit  par  une  société 
ou  une  corporation,  d'une  profession,  d'un  com- 
merce ou  d'une  industrie.  Et  nous  avons  ici  vin 
mode  très-simple  de  constatation,  Nous  savons  que, 
dans  chaque  profession,  commerce  ou  industrie,  on 
ne  peut,  pour  réussir,  dépenser  en  frais  généraux, 
plus  d'une  certaine  proportion  des  recettes.  J'en- 
tends par  frais  généraux,  les  frais  de  loyer  du  local 
destiné  à  l'exercice  de  la  profession,  du  commerce, 
ou  de  l'industrie,  de  salaires  des  commis  et  employés. 
Il  est  facile  de  constater  ces  items  de  dépenses,  sants 
se  livrer  à  aucune  enquête  vexatoire  sur  les  aifaires 
de  chacun.  Quoi  de  plus  aisé  que  de  connaître  la 
valeur  locative  d'un  bureau  d'allaires,  le  salaire 
d'un  commis?  On  sait,  je  le  répète,  que  les  sommes 
ainsi  employées  n'absorbejit  pas  au-delà  d'une  quan- 
tité déterminée  du  revenu  provenant  des  allaires. 
On  sait  aussi  quelle  est,  dans  chaque  profession  ou 
commerce,  la  proportion  entre  ces  dépenses  et  le 
rcA'enu.  On  sait  enlin,  que  ces  dépenses  sont  d'au- 
tant moindres  relativement  au  revenu,  que  celui-ci 
est  plus  élevé.  Nous  avons  donc  ainsi  tous  les  élé- 
ments nécessaires  pour  arriver  à  une  constatatioii 
très-approximati  ve. 

Prenons  un  exemple.  Je  suppose  que,  dans 
le  commerce  en  détail,  les  frais  généraux  dont  j'ai 
parlé,  montent  au  quart  du  revenu  du  commerce 
lorsque  ce  levenu  est  moindre  de  jCIOOO,  au 
sixième  quand  il  est  de  XI 000  à  i:2000,  au  huitième 
quand  il  est  de  jC2000  ou  plus  etc.;  si  nous  trouvons 
qu'un  marchand  dépense,  pour  le  loyer  de  son  ma- 
gasin el  le  salaire  de  ses  commis,  une  somme  qui 
ne  dépasse  pas  £250,  nous  i)ourrons  estimer  à  jCIOOO 
le  revenu  de  sou  commerce  ;  si  la  dépense  pour 
loyer  et  commis  dépasse  i;250,  mais  ne  dépasse  pas 
.€375,  nous  mettrons   le  revenu  à  €2000  ;  si  cette 


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—  36  — 

dépense  dépasse  £515,  le  revenu  du  commerce  sera 
présumé  être  de  .£3000,  etc. 

Nous  pouvons  employer  le  même  procédé  pour, 
les  marchands  en  gros,  les  banques,  les  compagnies 
industrielles,  les  avocats,  les  notaires,  les  médecins. 
Il  n'y  aurait  qu'à  s'assurer  d'abord,  pour  chaque 
profession,  commerce  ou  industrie,  de  la  proportion 
entre  les  frais  généraux  dont  j'ai  parlé  et  le  revenu. 

En  résumé  :  répartition  des  taxes,  pour  les  rési- 
dents d'après  tout  leur  revenu,  pour  les  non-rési- 
dents, d'après  le  revenu  des  propriétés  foncières  ou 
des  capitaux  possédés  ici,  des  professions,  commerces 
ou  industries  exercés  i^i  ;  constatation  de  ces  reve- 
nus, pour  le  résident,  au  moyen  de  la  valeur  loca- 
tive  du  local  occupé  comme  résrdeuce.  Jointe  au 
salaire  des  serviteurs  et  domestiques,  à  la  valeur 
de  la  pension  de  ceux-ci,  et  aux  frais  d'entretien  des 
équipages  ;  pour  les  non-résidents,  au  moyen  de  la 
valeur  locative  de  leurs  propriétés  foncières,  des 
intérêts  constatés  par  le  bureau  d'enregistrement 
de  leurs  capitaux  i^lacés  sur  hypothèques,  de  la 
valeur  locative  des  locaux  «employés  pour  l'exercice 
de  la  profession,  du  o  m>  -^e  ou  de  l'industrie, 
jointe  au  salaire   des  commis  et  employés. 

Je  ne  vois  pas  les  objections  fondées  que  l'on 
peut  faire  à  ce  système.  On  ne  pourrait  pas  même 
lui  reprocher  sa  nouveauté,  puisqu'il  est  déjà  prati- 
qué en  France  depuis  1791,  au  sujet  de  l'impôt 
mobilier,  de  l'impôt  des  portes  et  fenêtres  et  de 
l'impôt  des  patentes.  Outre  l'avantage  de  l'équité, 
il  aurait  ceux  qu'ont  tous  les  impôts  de  répartition  : 
la  certitude  du  montant  qu'il  pourrait  produire.  En 
effet,  étant  coniin  le  montant  du  revenu  dont  on 
doit  tenir  compte,  et  le  montant  que  l'on  veut  faire 
produire  à  la  taxe,  la  répartition  de  '-^ViC-ci  entre  les 
contribuables  se  trouverait  toute  '  :  ;  une  simple 
règle  de  trois  indiquerj:.lt  la  son  •  ;  a  payer  par 
chacun.  Ainsi,  je  suppose  que  le  to.  1  du  revenu 
sujet  à  la  taxe  est  de  $2,000,000,  la  somme  à  prélever 
de  $4,000,000,  chacun  devrait  i)ayer  un  cinquième 
de  son  revenu  imposable.  Au  lieu  qu'aujourd'hui 
les  taxes  spéciales  ne  pèsent  que  sur  la  propriété 
foncière,  elle  p>seraient  avec  ce  système  sur  toutes 


.:.  .:  ,.        ~  37  —    ■  ■„  ...-.;.. 

les  sources  de  revenu  Enfin,  un  avantage  au  moins 
temporaire  de  ce  système^  c'est  que  ses  données 
s'écartent  si  peu  de  celles  du  système  actuel,  que 
nous  n'avons  pas  à  craindre  de  difficultés  dans  son 
application.  Il  n'exigerait  presque  pas  autre  chose 
des  cotiseurs  que  ce  qu'ils  l'ont  aujourd'hui  :  cons- 
tater la  valeur  locative  des  maisons,  etc. 

Je  ne  puis  développer  ce  plan  avec  tous  les 
détails  qu'il  comporte,  mais  je  crois  en  avoir  dit  as- 
sez pour  le  faire  comprendre  sufFxSamment. 

Je  n'ai  pas  parlA  de  la  taxe  pour  l'eau  de  l'aque- 
duc, parce  qu'à  l'égard  des  propriétés  oii  passent  les 
conduits  de  distribution,  ce  n'est  pas  une  taxe,  mais 
le  loyer  d'une  chose  dont  on  tire  un  profit  direct. 
Il  est  donc  évident  que,  pour  ces  propriétés,  cette 
taxe  devrait  être  maintenue  comme  elle  est  aujour- 
d'hui.- 


XIV. 

Après  avoir  établi  un  bon  système  de  taxes,  il 
faudrait  assurer  le  paiement  exact  de  celles-ci.  Je, 
crois  qu'un  excellent  moyen  pour  cela,  consisterait 
à  accorder  un  escompte  à  ceux  qui  paieraient  dans 
un  délai  déterminé. 

Mais  ce  serait  en  vain  que  nous  augmenterions 
nos  revenus,  s'ils  devaient  être  mal  employés.  Il 
est  donc  important  que  nous  ayions  une  adminisr 
tration  honnête,  intelligente  et  active.  J'ai  déjà 
prouvé  que  nous  ne  la  trouverions  pas  plus  dans 
des  commissaires  nommés  par  le  gouvernement, 
que  dans  un  conseil  électif.  Mais  on  voit  toute 
limportance  qu'a  l'élection  de  ce  conseil.  Quelques 
changements  dans  la  loi  actuelle  sur  les  élections 
municipales,  seraient  peut-être  à  propos.  La  lon- 
gueur des  observations  que  j'ai  déjà  faites  ne  me 
permet  pas  de  les  expliquer. 

En  résumé  donc,  je  crois  avoir  prouvé  que  notre 
position,  sans  être  brillante,  est  encore  solide;  que 
notre  administration  municipale,  dont  on  dit  tant 
de  mal,  n'est  pas  plus  mauvaise  que  celle  de  Mont- 
réal, dont  on  dit  tant  de  bien  ;  que  des  commis- 
saires ne  l'amélioreraient  pas  ;  que  si  notre  situation. 


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—  38  — 

t  '  plus  mauvaise  que  celle  de  Montréal,  c'es^t  par- 
ceque  nous  ayons  des  dépenses  indispensables 
relativement  beaucoup  plus  fortes  que  celles  de 
cette  ville  ;,que  nous  devons  chercher,  non  pas  tant 
à  mieux  administrer  nos  revenus,  qu'à  les  augmen- 
ter ;  que  le  moyen  de  les  augmenter  sans  fatiguer 
les  contribuables,  c'est  d'étendre  les  limites  de  la 
A'ille  et  de  mieux  repartir  les  taxes  ;  que  pour  répar- 
tir celles-ci  plus  équitablement  qu'aujourd'hui,  il 
faudrait  les  baser  sur  le  revenu  des  contribuables. 

Travaillons  donc  pour  obtenir  ces  réformes, 
au  lieu  de  passer  notre  temps  à  des  plaintes  stériles, 
à  un  dénigrement  systématique  de  nos  institutions 
municipales.  Je  comprends  ces  plaintes  et  ce  déni- 
grement, de  la  part  de  ceux  qui  regrettent  de  ne 
l)ouvoir  nous  exploiter  mieux  qu'ils  ne  le  font  au- 
jourd'hui, qui  voudraient  pouvoir  arranger  à  nos 
dépens,  dans  le  huis-clos  d'une  commission,  leurs 
petites  affaires  auxquelles  le  grand  jour  de  la  dis- 
cussion publique  au  conseil  est  trop  incommode. 
Mais,  ce  que  je  ne  puis  m'expliquer,  c'est  que  nous 
nous  laissions  berner  et  duper  par  eux,  jusqu'à  con- 
sentir à  nous  faire  les  instruments  des  desseins 
qu'ils  "méditent  contre  nous,  jusqu'à  nous  bander 
les  yeux,  jusqu'à  demander,  nous,  sujets  britan- 
niques, habitués  à  la  liberté,  qu'on  nous  mette  en 
senùt'.de;  et  cela,  dans  un  moment  où,  non  seule- 
liient  la  France,  i'Iispagne  et  l'Autriche,  mais  la 
Russie  et  la  Turquie  elles-mêmes,  aspirent  au  seff- 
g'overnvw)//. 

Cessons  donc  de  donner  un  pareil  spectacle  à 
toute  l'Amérique.  Travaillons  i)lus,  critiquons 
moins,  surveillons  davantage,  et  nous  verrons  que 
la  lumière  vaut  mieux  que  les  ténèbres,  la  liberté 
que  l'esclavage.  Nous  nous  apercevrons  bientôt 
que  notre  système  municipal  nciuel,  sans  compter 
qu'il  fait  plus  d'honneur  à  notre  intelligence,  aux 
yeux  des  étrangers,  vaut  mieux  que  tomes  les 
commissions  du  monde." 


Décem])re,  186S. 


FIN.